Cet article est publié en 4 épisodes.
Si vous voulez lire les épisodes précédents : cliquez sur ces liens.
Troisième partie.
Par José-Daniel TOUROUDE, docteur en sciences sociales.
Question N°7 : On voit toujours les collectionneurs acheter
pour assouvir leur envie d’accumulation d’objets mais savent-ils ce qu’ils
achètent ?
Le collectionneur achète mais pas
n’importe quoi, il suit un fil rouge qui structure sa collection !
Le collectionneur n’est pas un obsédé de l’achat
compulsif au contraire, il sait ce qu’il recherche et ne cherche pas à
accumuler pour accumuler, sauf cas rares. Même s’il achète beaucoup, même si sa passion est
onéreuse, le collectionneur n’a pas pour but d’acheter toujours plus (sauf cas
rares de thésaurisateurs obsessionnels proches psychologiquement des avares qui
stockent et cachent leurs objets).
L’objectif du collectionneur est de réunir des
d'objets identifiés, choisis par lui et ayant un intérêt esthétique,
historique ou affectif correspondant au lien, au fil rouge de sa collection
qu’il a déterminé. Chez le collectionneur, l'achat n'est qu'un moyen
de constitution d'un groupe d'objets et il est toujours en quête d’une
trouvaille nouvelle et d’un achat à faire.
L’euphorie provoquée par un achat
heureux se dissipe obligatoirement plus ou moins rapidement, une fois
l’objet incorporé à la collection. Il y a des périodes où le collectionneur
achète moins car il ne trouve pas les objets convoités ou parce qu’il ne
possède pas les finances adéquates. La
fièvre acheteuse est activée seulement lorsqu’il voit dans des enchères un
objet qui l’intéresse, un coup de cœur...
En commentant chaque objet de la
collection, il raconte souvent une histoire autour de chaque objet et
le collectionneur devient vite conteur. La recherche, l’information, le récit
d’acquisition, la victoire de l’avoir emporté face aux autres collectionneurs,
la découverte et la restauration de l’objet, sa place dans l’exposition de la
collection, tout cela fait l’objet d’un récit, parfois d’une véritable saga qui
interpelle l’histoire à la fois de la traçabilité de l’objet mais aussi de
l’histoire de son acquisition voire de la personne. En racontant, il revit les moments
passés forts où il est l’acteur principal. Le premier achat, les objets ratés, les
bonnes affaires et les mauvaises, tout est prétexte pour raconter ses aventures
de chercheur de trésor et montrer que la collection a une histoire, un passé
mais aussi un présent avec la collection et peut être un futur programmé (don à
un musée) ou aléatoire (remise sur le marché). En fait le collectionneur prouve que sa collection
d’objets est vivante et que lui, par la même occasion l’est aussi !
La collection est un miroir. Une
collection est un choix personnel, la réunion et la conservation d’objets ont
une valeur subjective. Voir la collection d’un
collectionneur permet d’apprendre beaucoup sur lui et l’écouter commenter sa
collection encore plus. Le collectionneur choisit une catégorie d’objets qui a du sens pour lui : rappel de
souvenirs, qualités esthétiques, intérêt intellectuel… Le
collectionneur s’identifie à sa collection car il définit un champ d’objets à accumuler qui l’intéresse et qui
a du sens pour lui. Il y a quelque chose de narcissique
dans toute collection, miroir dans lequel le collectionneur tente de s’identifier,
de se regarder. Sa collection est proche d'une création
personnelle, témoignant de ses goûts et de ses passions. La recherche le pousse alors vers les
autres et vers d’autres objets, en vue d'acquérir ce qui lui manque et de
compléter et d’améliorer sa collection – miroir pour parfaire le portrait.
La collection des autres paraît toujours bizarre (pourquoi collectionner des bouchons, des machines à écrire ou des bouts de papier ?). Le collectionneur attribue un pouvoir et une valeur aux objets parce que leur présence et leur possession ont une fonction positive parfois même réparatrice, palliative, protectrice face à l’anxiété et l’incertitude environnantes. Le collectionneur n’a guère envie de s’arrêter car il y prend du plaisir et l’accumulation d’objets pour une collection est donc sans fin car souvent elle se réoriente dans le temps, et se déplace vers d’autres objets. Le sujet de la collection et les objets qui la composent ont un sens très profond. « Ma collection de clarinettes est en fait un substitut à la scène, je me valorise d’une autre façon avec le même objet et je continue d’approfondir le sujet principal de ma vie en ouvrant des portes insoupçonnées auparavant»
«Je suis d’une famille de musicien, je suis un chineur d’objets et je ne collectionne pas les instruments de musique à vent par hasard » dira un autre. « Collectionner c’est approfondir un sujet qui est important pour soi même. Je suis satisfait de conserver une petite partie du patrimoine instrumental français et en tant que pédagogue j’aime permettre à des non initiés de découvrir la clarinette car ils ne seraient jamais rentré dans un musée spécialisé » dira un troisième.
Question N°8 : Quel est le rapport du collectionneur avec l’argent ? cela a l’air compliqué .
L’entourage d’abord : Il faut gérer les proches et ce n’est pas toujours facile pour le collectionneur de partager et de faire comprendre une passion qui n’intéresse pas les autres. Seul un collectionneur peut comprendre un autre collectionneur même si les objets sont différents et bien sûr les personnes tolérantes et aimantes. Le collectionneur quand il est pris par la passion se sent parfois en danger et essaie souvent d’être soutenu dans la responsabilité de sa prise de décision d’acheter. L’acceptation de l’entourage est donc essentiel pour ne pas se sentir coupable de ses passions voire de ses «coups de folies» mais aussi pour servir de digue pour ne pas dépasser les limites du raisonnable.
Les néophytes : Le collectionneur est attentif aux personnes non initiées, qui est son public à qui il expose ses trésors, explique sa collection et son travail et devient vite bavard. Mais face à une personne qui vend un objet convoité et qui ne connaît rien, il est intéressant pour le collectionneur de taire son savoir pour faire une bonne affaire. C’est la plus value de la compétence.
Les amis : sont curieux de voir la collection avec de multiples questions, leur sourire d’incompréhension devant une telle passion, et souvent la jalousie, car s’impliquer dans quelque chose qui à la fois passionne, donne un sens à la vie et qui possède un rôle de faire-valoir est assez rare.
Les revendeurs : la relation entre le collectionneur et le revendeur ou marchand d’objets collectionnés est différente du rapport habituel entre client et vendeur car celui-ci comprend et partage sa passion et sa recherche. Le collectionneur a le sentiment d’avoir été choisi par un revendeur antiquaire spécialisé, d’être un client préféré et de recevoir des informations privilégiées, d’être au courant avant tout le monde d’un objet « sorti du grenier», d’être intégré à une communauté d’initiés. Les grandes ventes aux enchères jouent aussi là-dessus.
Les autres collectionneurs : collègues spécialistes, à la fois amis et concurrents mais qui ont la même passion, qui vous comprennent, mais qui au moment d’une enchère deviennent des adversaires. Ces collectionneurs partagent les mêmes valeurs, échangent des informations et d’ailleurs une discussion entre collectionneurs est aussi incompréhensible pour l’entourage qu’une discussion technique entre informaticiens ! Le jargon de spécialiste devient alors un mode de reconnaissance. Le collectionneur possède souvent une vie sociale et est en fait un faux solitaire, il appartient à un réseau qui échange des informations et même des potins !
La visite des collections d’amis et des musées spécialisés sont essentiels et tous regrettent de ne pas avoir des contacts encore plus étroits avec les spécialistes souvent érudits, passionnés et sympathiques (sauf parfois lors des enchères ou c’est chacun pour soi) Le collectionneur est un chercheur, un chineur qui aime découvrir un trésor que les autres n’ont pas vu ou qui a emporté, de haute lutte, les enchères après une compétition acharnée. Le collectionneur même le plus introverti et solitaire doit avoir des relations avec les autres;
Nous ne pouvons envisager la relation que le collectionneur entretient avec l'objet sans prendre en compte le tiers, l'autre comme moteur du désir. En fait le collectionneur est un accumulateur solitaire voulant être reconnu par les autres.
Le collectionneur est un échangeur d’informations et d’objets avec ses collègues, son réseau de partenaires.
Le collectionneur est souvent un paradoxe vivant car d’une part il est un thésaurisateur solitaire qui garde pour lui des objets qu’il considère comme des joyaux mais d’autre part il aime aussi organiser sa collection, rechercher des informations sur ses objets, partager, échanger et montrer sa collection aux autres contrairement au thésaurisateur ! La majorité des collectionneurs aiment s’entourer de personnes partageant leur passion et aiment étaler leurs possessions et leurs connaissances. Ils utilisent ces objets agencés en collection pour recevoir les félicitations du monde extérieur. Le collectionneur cherche à attirer l’attention pour prouver sa valeur ou simplement qu’il existe. Il a besoin d’être approuvé dans sa quête, d’être reconnu afin de rehausser l’image qu’il a de lui-même. Montrer sa collection est en principe une façon de s’exprimer souvent, de briller parfois mais aussi d’avoir des commentaires et des compléments d’informations sur ces objets. La collection est ainsi une représentation de lui-même. Comme tous les collectionneurs, il craint de découvrir chez d’autres collectionneurs rivaux, des objets plus intéressants ou nombreux et de voir son sentiment d’infériorité resurgir. Chacun se démarque des autres collectionneurs par des pièces rares que l’autre n’a pas et cela rend heureux et fier mais en même temps il est insatisfait de voir les pièces que l’autre possède et qu’il n’aura sans doute jamais. La collection est une composante de la vie, ouvrant des portes variées par l’intermédiaire d’une accumulation d’objets, donnant du sens à un travail comme redonner vie ou lier des objets entre eux pour reconstituer le patrimoine… tout cela crée une valorisation d’un travail ou d’une passion utile, d’une reconnaissance par les autres, de vivre des bons moments gratifiants lors d’exposés ou d’expositions de ses trésors mais aussi de contacts enrichissants, d’approfondissement des connaissances.
Faire une collection, c’est une succession de victoires sur soi même et sur les autres.
La collection des autres paraît toujours bizarre (pourquoi collectionner des bouchons, des machines à écrire ou des bouts de papier ?). Le collectionneur attribue un pouvoir et une valeur aux objets parce que leur présence et leur possession ont une fonction positive parfois même réparatrice, palliative, protectrice face à l’anxiété et l’incertitude environnantes. Le collectionneur n’a guère envie de s’arrêter car il y prend du plaisir et l’accumulation d’objets pour une collection est donc sans fin car souvent elle se réoriente dans le temps, et se déplace vers d’autres objets. Le sujet de la collection et les objets qui la composent ont un sens très profond. « Ma collection de clarinettes est en fait un substitut à la scène, je me valorise d’une autre façon avec le même objet et je continue d’approfondir le sujet principal de ma vie en ouvrant des portes insoupçonnées auparavant»
«Je suis d’une famille de musicien, je suis un chineur d’objets et je ne collectionne pas les instruments de musique à vent par hasard » dira un autre. « Collectionner c’est approfondir un sujet qui est important pour soi même. Je suis satisfait de conserver une petite partie du patrimoine instrumental français et en tant que pédagogue j’aime permettre à des non initiés de découvrir la clarinette car ils ne seraient jamais rentré dans un musée spécialisé » dira un troisième.
Question N°8 : Quel est le rapport du collectionneur avec l’argent ? cela a l’air compliqué .
L’argent n’est pas une
fin mais un moyen pour le collectionneur pour acheter, mais pas n’importe
quoi, car il a un fil rouge rationnel et explicite pour effectuer ses
achats. L’argent n’est que le moyen de réaliser sa
passion pour acheter, échanger, vendre pour étendre et améliorer sa collection.
La valeur
monétaire de la collection n’est pas le but premier recherché, elle est souvent
secondaire mais
cette notion est pourtant omniprésente. La plupart des collectionneurs savent
combien ils ont acheté les différents objets de leur collection, s’ils se sont
fait avoir ou s’ils ont fait une bonne affaire. Souvent ils ont notés les prix
dans leurs catalogues. Peu pensent que ce sont des placements,
alors même que pour se justifier et se défendre contre les achats jugés
abusifs, nombre d’entre eux avancent cet argument notamment à leur entourage. Le sens de la collection est souvent
autre et plus intellectuel (défense du patrimoine culturel, illustration par
des objets de l’histoire de l’art ou de l’histoire tout court, par exemples). Mais pour acheter il faut
de l’argent ! Sur ce sujet, le collectionneur peut être assez ambivalent. En effet il est souvent
très intéressé par l’aspect économique car il connaît les prix de objets en
vente, connaît les fluctuations du marché, évalue le prix de sa collection.... A part les antiquaires et
facteurs collectionneurs dont c’est le métier, l’argent n’est pas une fin (d’ailleurs
certains après une vie de sacrifices donnent leur collection à leur
mort !) et pourtant le collectionneur va économiser souvent pour réaliser
l’achat d’un objet convoité, rogner sur ses vacances pour gagner une enchère,
ce qui est incompréhensible pour les autres. D’autre part la
revente d’instruments permet le financement d’autres instruments. L’accumulation monétaire puis
la dépense d’argent sont cruciales pour lui. L’entourage a souvent du mal à
saisir ces dépenses pour des objets peu utiles ou à la beauté subjective voire très
discutable (sauf pour le collectionneur). Parfois la négociation est délicate, l’entourage ne comprend pas pourquoi acheter encore
un nouvel instrument alors qu’il en a déjà beaucoup (trop !) et qu’il y a
d’autres priorités pour le foyer. Mais en fait, les
collectionneurs arrivent à gérer leur entourage pour financer leur collection
car ils sont relativement sages (ou relativement passionnés) en se fixant et en
respectant des règles. Les proches que j’ai
interviewé répondent à cette interrogation «que collectionner des objets vaut
mieux que dépenser l’argent sur des activités plus inavouables ! et que
pendant qu’il collectionne, il se détend et les proches sont plus
tranquilles ! et puis on sait quels
cadeaux offrir pour faire plaisir à un collectionneur !»
Question N°9 : le collectionneur a soi-disant un plaisir
solitaire mais est sans cesse confronté aux autres. Quel est son rapport aux
autres ?
Le collectionneur est ambivalent car
d’une part il a une passion solitaire et vit une relation spéciale avec ses
objets et d’autre part il a besoin de nombreux contacts et relations avec
d’autres personnes. L’entourage d’abord : Il faut gérer les proches et ce n’est pas toujours facile pour le collectionneur de partager et de faire comprendre une passion qui n’intéresse pas les autres. Seul un collectionneur peut comprendre un autre collectionneur même si les objets sont différents et bien sûr les personnes tolérantes et aimantes. Le collectionneur quand il est pris par la passion se sent parfois en danger et essaie souvent d’être soutenu dans la responsabilité de sa prise de décision d’acheter. L’acceptation de l’entourage est donc essentiel pour ne pas se sentir coupable de ses passions voire de ses «coups de folies» mais aussi pour servir de digue pour ne pas dépasser les limites du raisonnable.
Les néophytes : Le collectionneur est attentif aux personnes non initiées, qui est son public à qui il expose ses trésors, explique sa collection et son travail et devient vite bavard. Mais face à une personne qui vend un objet convoité et qui ne connaît rien, il est intéressant pour le collectionneur de taire son savoir pour faire une bonne affaire. C’est la plus value de la compétence.
Les amis : sont curieux de voir la collection avec de multiples questions, leur sourire d’incompréhension devant une telle passion, et souvent la jalousie, car s’impliquer dans quelque chose qui à la fois passionne, donne un sens à la vie et qui possède un rôle de faire-valoir est assez rare.
Les revendeurs : la relation entre le collectionneur et le revendeur ou marchand d’objets collectionnés est différente du rapport habituel entre client et vendeur car celui-ci comprend et partage sa passion et sa recherche. Le collectionneur a le sentiment d’avoir été choisi par un revendeur antiquaire spécialisé, d’être un client préféré et de recevoir des informations privilégiées, d’être au courant avant tout le monde d’un objet « sorti du grenier», d’être intégré à une communauté d’initiés. Les grandes ventes aux enchères jouent aussi là-dessus.
Les autres collectionneurs : collègues spécialistes, à la fois amis et concurrents mais qui ont la même passion, qui vous comprennent, mais qui au moment d’une enchère deviennent des adversaires. Ces collectionneurs partagent les mêmes valeurs, échangent des informations et d’ailleurs une discussion entre collectionneurs est aussi incompréhensible pour l’entourage qu’une discussion technique entre informaticiens ! Le jargon de spécialiste devient alors un mode de reconnaissance. Le collectionneur possède souvent une vie sociale et est en fait un faux solitaire, il appartient à un réseau qui échange des informations et même des potins !
La visite des collections d’amis et des musées spécialisés sont essentiels et tous regrettent de ne pas avoir des contacts encore plus étroits avec les spécialistes souvent érudits, passionnés et sympathiques (sauf parfois lors des enchères ou c’est chacun pour soi) Le collectionneur est un chercheur, un chineur qui aime découvrir un trésor que les autres n’ont pas vu ou qui a emporté, de haute lutte, les enchères après une compétition acharnée. Le collectionneur même le plus introverti et solitaire doit avoir des relations avec les autres;
Nous ne pouvons envisager la relation que le collectionneur entretient avec l'objet sans prendre en compte le tiers, l'autre comme moteur du désir. En fait le collectionneur est un accumulateur solitaire voulant être reconnu par les autres.
Le collectionneur est un échangeur d’informations et d’objets avec ses collègues, son réseau de partenaires.
Le collectionneur est souvent un paradoxe vivant car d’une part il est un thésaurisateur solitaire qui garde pour lui des objets qu’il considère comme des joyaux mais d’autre part il aime aussi organiser sa collection, rechercher des informations sur ses objets, partager, échanger et montrer sa collection aux autres contrairement au thésaurisateur ! La majorité des collectionneurs aiment s’entourer de personnes partageant leur passion et aiment étaler leurs possessions et leurs connaissances. Ils utilisent ces objets agencés en collection pour recevoir les félicitations du monde extérieur. Le collectionneur cherche à attirer l’attention pour prouver sa valeur ou simplement qu’il existe. Il a besoin d’être approuvé dans sa quête, d’être reconnu afin de rehausser l’image qu’il a de lui-même. Montrer sa collection est en principe une façon de s’exprimer souvent, de briller parfois mais aussi d’avoir des commentaires et des compléments d’informations sur ces objets. La collection est ainsi une représentation de lui-même. Comme tous les collectionneurs, il craint de découvrir chez d’autres collectionneurs rivaux, des objets plus intéressants ou nombreux et de voir son sentiment d’infériorité resurgir. Chacun se démarque des autres collectionneurs par des pièces rares que l’autre n’a pas et cela rend heureux et fier mais en même temps il est insatisfait de voir les pièces que l’autre possède et qu’il n’aura sans doute jamais. La collection est une composante de la vie, ouvrant des portes variées par l’intermédiaire d’une accumulation d’objets, donnant du sens à un travail comme redonner vie ou lier des objets entre eux pour reconstituer le patrimoine… tout cela crée une valorisation d’un travail ou d’une passion utile, d’une reconnaissance par les autres, de vivre des bons moments gratifiants lors d’exposés ou d’expositions de ses trésors mais aussi de contacts enrichissants, d’approfondissement des connaissances.
Faire une collection, c’est une succession de victoires sur soi même et sur les autres.
Dans la mode, c'est ce que nous propose
la publicité, il s'agit de désirer ce que l'autre possède, par un mécanisme
d'identification, Chez certains collectionneurs, on
assiste à un autre phénomène qui s'apparente à la psychologie du joueur :
gagner l’objet donne une double satisfaction, d’une part acquérir l’objet
convoité et d’autre part savoir que l’autre ne l’aura pas ! (ou alors qu’il
l’achète mais au prix maximum en faisant monter les enchères et lui faire payer
son audace de vous prendre l’objet convoité ! ) La compétition avec les autres pour
gagner la pièce que l’on convoite entre partenaires mais néanmoins adversaires
ou au moins concurrents, joue un grand rôle dans cette quête effrénée de
triomphe personnel. On le voit dans les ventes aux enchères, des brouilles, des
jalousies se font sur un objet convoité raté : la victoire de l’un
entraine forcément la déception de l’autre. Nous pouvons assister lors des enchères
publiques, lorsqu'un autre collectionneur convoite un objet, celui-ci acquiert
une certaine valeur car le désir de l'autre lui confère alors une valeur
nouvelle.
Et puis le doute permanent le taraude : « Pourquoi
X, qui est un grand spécialiste s’intéresse à cet instrument, il y a quelque
chose qui m’a échappé….» est une phrase souvent entendue, et l’intox fait rage pour cacher les vrais désirs….Le plaisir de gagner sur les autres
concurrents est essentiel et reprend les bases de la compétition. C’est
peut-être pourquoi on retrouve une grande majorité d’hommes chez les
collectionneurs.
(Les femmes collectionnent vêtements,
bijoux, chaussures et autres sacs à main disent leurs maris collectionneurs !) L'échange quant à lui, s'il implique
une relation entre passionnés (relation qui est parfois le moteur de la
collection), repose toujours sur le double mouvement perte / gain (parce
qu'aucun objet ne peut valoir exactement un autre). On propose à l'autre un objet qui
possède à nos yeux une valeur faible contre un autre plus précieux. En somme
dans l'échange, il s'agit souvent de gagner sur l'autre, à son dépend grâce à
son expertise supérieure. Pour beaucoup, l’esprit
nationaliste intervient aussi quand on voit des pièces du patrimoine national
et des collections patiemment agencées se disloquer à l’étranger et quand le
musée du conservatoire de Paris bloque la vente d’un objet national en imposant
la préemption, empêchant ainsi un américain ou un asiatique de l’emmener il est
applaudi ! Là encore le collectif des collectionneurs nationaux via l’Etat
français a gagné sur les puissances financières internationales ! (c’est à
dire des fondations qui soutiennent et sponsorisent des musées ou des riches
collectionneurs à fonds illimités )
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire