Karl Gottlob
KRETZSCHMANN est né en Allemagne, à Markneukirchen (Saxe) le 19
avril 1777. Il était le fils du facteur Johann Gottfried KRETZSCHMANN de
Markneukirchen et d’Eva Rosina GOETZ et appartenait à la célèbre
famille du « Vogtland » qui a donné de nombreux facteurs
d’instruments de musique. Il est arrivé vers 1809 à Strasbourg, sans doute
accompagné d’un neveu, Charles Gottlob KRETZSCHMANN, facteur
d’instruments, né à Neukirchen, décédé à 25 ans le14 juin 1813 à Strasbourg. Le
père de ce neveu, Adam KRETZSCHMANN, était aussi facteur en Saxe.
Marque de Charles Kretzschmann. |
Signature de Charles Kretzschmann père. |
Le second
fils, Charles Auguste KRETZSCHMANN, né à Strasbourg le 16 octobre 1818
prendra la succession de la Maison en 1842 à la mort de son père. Quant à Frédérique
Wilhelmine (Guillemette) KRETZSCHMANN, née le 23 décembre
1821 à Strasbourg, célibataire, elle décédera le 12 septembre
1860 à Scharrachbergheim dans le Bas Rhin. Dès son arrivée à Strasbourg en
1809, Charles Kretzschmann père se déclara fabricant d’instruments à vent et
s’établira au N° 5 de la rue Saint Hélène, adresse des Kretzschmann père et
fils pendant toute leur activité. La fabrication de l’atelier comportait
tous les instruments à vent en cuivre : cornets, trompettes, cors,
trombones, ophicléides et utilisait exclusivement le système allemand de
barillets rotatifs.
Pavillon d'un cor naturel de Charles KRETZSCHMANN père.
(Collection R. Charbit)
|
Petit cor de poste (Vente de Vichy juin 2006) |
Grand bugle à 7 clés en Fa en forme de demi lune de Charles KRETZSCHMANN à Strasbourg. (Collection Richard Charbit) |
Trompette demi-lune (collection B. Kampmann) |
Jean FINCK (1807-1858),
autre facteur de cuivre installé à Strasbourg, a sans doute été formé dans
l’atelier Kretzschmann, puisque il ne quitta pas Strasbourg et se déclarera
tourneur de 1807 à 1817, puis seulement à partir de cette date, fabricant
d’instruments à vent. Seul Kretzschmann avait la compétence à Strasbourg pour
former un élève. La collaboration entre les différents facteurs strasbourgeois
ne s’arrêtera pas là, comme le montrent ces deux cors naturels marqués
« Bühner et Keller » et « Dobner », visiblement fabriqués
par Kretzschmann.
Cor naturel de Bühner et Keller fait par Charles Kretzschmann (collection RP) |
Cor naturel marqué Dobner à Strasbourg sans doute fabriqué par Kretzschmann (Collection Richard PICK) |
A la mort
de Charles Gottlob KRETZSCHMANN,
le 18 février 1842 à Strasbourg, son fils unique Charles Auguste KRETZSCHMANN, âgé de 23 ans prit logiquement la
suite de son père. Il devait avoir été formé très tôt dans l’affaire, puisque
que dès 1844 il participa à l’Exposition de Paris, où il présenta des bugles à
Cylindres, un bugle basse et un bombardon.
Signature de Charles Auguste Kretzschmann (1818-1888) |
Cornet à pistons en ut/mi b (N° 625 de la collection Bruno KAMPMANN) |
Il obtiendra
le 1 mai 1850 un brevet de 15 ans N° 9850 « Améliorations et
changements apportés au mécanisme des cylindres rodiques qui sont applicables à
tous les instruments de musique tels que cornets, clairons etc…. » En
fait C.A Kretzschmann était un partisan « du système à cylindres rodiques »
auquel il trouvait de multiples avantages, dont celui de laisser passer l’air
d’une façon plus naturelle et sans obstruction ; en revanche il voulait
améliorer son inconvénient majeur, la fragilité et avait conçu un « couvercle manivelle» qui
fonctionnait sans friction. Selon Bruno
KAMPMANN « ….l’idée est très proche de la
walzenmaschine brevetée par CERVENY postérieurement en 1873. La particularité
unique est que les ressorts de rappel sont inclus dans les barillets, et non
situés dans un rotor extérieur ». Si vous voulez en savoir
plus (et si vous parlez allemand) ce système est détaillé à la
page 35 de l’ouvrage de Günter DULLAT
« Metallblasinstrumentenbau ».
Trompette en sol à trois barillets et ton de sol,
appliquant ce brevet, en particulier le couvercle manivelle
(N° 528 de la collection Bruno KAMPMANN)
|
Il récidivera en 1856 et obtiendra le 23 juin un brevet de 15 ans (N° 28038) pour la fabrication d’un « système de pistons à mouvement horizontal avec pression verticale, applicable à tous les instruments de musique en cuivre ».
« Clairon chromatique baryton en si utilisant ce nouveau brevet » (Musée de la Musique à Paris) et schéma expliquant ce nouveau système à pression verticale et mouvement horizontal. Günter DULLAT « Metallblasinstrumentenbau ».
A cette date, il faisait partie de la coalition des facteurs d’instruments qui luttera contre l’hégémonie du grand Adolphe SAX. Nous n’allons pas « répéter » ces procès fastidieux entre la coalition et le « pauvre Adolphe Sax martyr de tous ces cupides facteurs d’instruments », discours convenus et entretenus par des écrivains bien connus, comme Oscar Comettant et le Comte Ad de Pontécoulant, discours repris en cœur dans tous les documents publiés sur Sax, même actuellement ; ouvrages dans lesquels KRETSCHMANN est cité très rarement, sinon pour souligner « sa cupidité » et son « incompétence ». Pourtant il existe un nombre impressionnant d’ouvrages reprenant l’ensemble des procès opposant Kretzschmann à Sax, disponibles à la Bibliothèque Nationale de France, montrant que le combat fût long, âpre et que l’issue ne fût pas si favorable pour Sax, puisque en appel, Kretzschmann fut condamné non pas pour contrefaçon, mais pour…recel de 4 instruments produits par Kretzschmann comme preuve d’antériorité au brevet Sax de 1845 et pour les avoir introduit en France.
Le Grand Adolphe Sax. |
Les procès entre A. Sax et C.A. Kretzschmann : procès longs et pas particulièrement flatteurs pour le "Grand Sax".
Reprenons
les éléments essentiels de ces procès. Ch. A. KRETZSCHMANN fut d’abord cité
comme témoin dans le procès qui opposa GAUTROT à SAX, mais son témoignage ne
fût pas retenu. Aussi, lorsqu’il fut cité comme témoin dans le
procès qui opposa BESSON à SAX, il produisit trois
instruments, fabriqués par son père (3 ophicléides altos à 3 pistons parallèles
vendus en 1839 et 1841 dont les propriétaires étaient suisses, et vosgiens) et un
quatrième, vendu par Kretzschmann fils en 1843 (ophicléide alto à trois
pistons), fabriqué avant le brevet Sax du 13 octobre 1845, qui revendiquait
l’invention :
« Des
instruments ayant le pavillon en l’air et les pistons parallèles au tube de
l’instrument ».
Sax fait
saisir ces quatre instruments, ainsi que les documents prouvant la vente à la
date indiquée, pour contrefaçons. Comme il était difficile de contredire les
dates, en particulier celles qui concernaient les instruments de Kretzschmann
père décédé en 1842, le tribunal décida que les instruments auraient été
modifiés après 1845 mais par qui ? Le tribunal n’osa accuser ni Besson, ni
Kretzschmann, puisque les instruments étaient arrivés au tribunal dans des
conditions particulières. Nous voudrions décrire avec quels soins les
propriétaires avaient fait parvenir au tribunal les instruments, propriétaires
qui c’étaient même déplacés durant les procès pour témoigner en faveur de
Kretzschmann.
Prenons le
cas de « l’ophicléide alto à trois pistons parallèles, fabriqué par feu
Mr KRETZSCHMANN père et vendu par lui le 19 octobre 1841 à Mr Louis
Hoffmann-Vulliemoz à Lausanne, canton de Vaud (Suisse). Cet instrument a été
produit en justice par son propriétaire actuel, Mr François Blanc, huissier à
Lausanne, à l’appui de sa déposition du 30 juillet 1858. Pour établir l’origine
et la date exacte de cet instrument, Mr KRETZSCHMANN fils avait produit :
· Les
livres de commerce de feu son père.
· Les
lettres relatives à cet instrument de Mr Louis Hoffmann-Vulliemoz.
· Une
déclaration notariée du 26 mai 1858 de MM Louis Hoffmann-Vulliemoz, François
Blanc propriétaire de l’instrument, David Thuillard, Philippe Pflüger, Frédéric
Allamand, Jacques Lauffen, Jacques Hoffman, Henri Blanc.
Les
signataires de cet acte ont déclaré « qu’étant tous membres du corps de
musique militaire de Lausanne, dirigé par le lieutenant Hoffman, ils ont vu cet
instrument dans leur musique dès l’année 1841. Cet instrument alors nouveau
pour eux, fut de leur part l’objet d’un examen particulier et leur a laissé un
souvenir parfaitement distinct, notamment par la position des pistons placés
tous trois ensemble dans la même direction parallèle au tube du
pavillon ». Ledit instrument reconnu cacheté par un notaire ». (5)
Le même
traitement étant fait pour les trois autres instruments, il faut croire que Mrs
Kretzschmann et Besson bénéficiaient d’un solide réseau de
« complices », puisque le 19 juin 1862 ils étaient accusés « non
pas d’avoir contrefait les quatre instruments, mais de les avoir introduits en
France et recélés, sachant qu’ils étaient contrefaits ». (5)
On comprend
mieux, pourquoi Constant PIERRE fut aussi sévère avec A.
SAX dans son ouvrage « Les facteurs d’instruments de
musique ».
« A.
SAX déposa de nouveau son bilan en 1873, après une période particulièrement
brillante, pendant laquelle il avait certainement vendu beaucoup d’instruments,
reçu plus de 500 000 frs d’indemnité du procès Gautrot, encaissé nombre de
primes des facteurs qui avaient sa licence pour faire des instruments imposés
sous son nom dans l’armée. Comment donc s’il n’y eut des dépenses excessives,
des remises exagérées, des frais de publicité énormes, des panégyristes
largement rémunérés, s’expliquer un tel désastre. Avec le nouveau régime, Ad. SAX
ne retrouva pas l’appui que lui avaient prêté les fonctionnaires de l’Empire,
la lutte redevint égale et toute pression officielle cessant, les facteurs
purent écouler les instruments de leurs systèmes, sans être contraints comme
auparavant, de se borner à la confection des types réglementaires imposés et
dénommés à l’instigation d’Ad. SAX ». (7)
Quant à Ch.
A. KRETZSCHMANN, il se retira des affaires vers 1860 : « Mr
KRETZSCHMANN s’est retiré des affaires ; mis en possession par son père
d’une fortune relativement considérable, augmentée encore par sa propre
industrie et suffisante aux besoins de son existence ». (5)
On remarque
également que son brevet de 1856 : « nouveau système à pression
verticale et mouvement horizontal » avait pour but de répondre au brevet
SAX de 1845, même s’il ne rencontra pas un franc succès.
Il se retira
à Scharrachbergheim, petite commune du Bas Rhin de 1000 habitants, située à 21
kms de Strasbourg. C’est là qu’il décédera le 12 octobre 1888 à l’âge de 70
ans, sans descendance. (*)
C’est Achille (François
Pascal) GALLICE qui prendra la succession de la Maison KRETZSCHMANN
dans les années 1860. Achille GALLICE était né à Briançon le 5 décembre 1832,
il était le fils de Pascal GALLICE ébéniste à Lyon. Avant son installation
rue des Frères, il devait travailler pour Jean Chrétien ROTH (Successeur de
Dobner et de la Maison Bühner et Keller), puisque lors de son mariage le 19
juillet 1856 à Strasbourg avec Pauline SCHATZ, fille d’un brossier de
Strasbourg, « J.C. ROTH, 40 ans facteur d’instruments et Jacques ROTH, 33
ans amis de la famille » en furent les témoins.
Achille GALLICE exerça son métier de « facteur d’instruments en bois et en cuivre » de 1867 à 1886 à la même adresse, 14 rue des Frères qui deviendra en 1880 la « Brüderhofgasse ».
Bibliographie :
(1) : Comte Ad de Pontécoulant : Organographie. Essai sur la facture instrumentale. Art, Industrie et commerce. Paris 1861.
(2) : Oscar Comettant : Histoire d’un inventeur au XIX° siècle. Adolphe Sax, ses ouvrages et ses luttes. Paris 1860.
(3) : Malou Haine : Adolphe Sax (1814-1894) Bruxelles.
(4) : Jean Pierre Rorive : Adolphe Sax (1814-1894), Inventeur de génie. Edition Racine.
(5) : Cour de Cassation. Mémoire ampliatif pour Mr Ch. A. Kretzschmann contre M. A. Sax. 1863 chez
Silbermann.
(6) : Cour de Cassation, chambre criminelle : Besson, Kretzschmann contre Sax : BNF 4 FM 16527.
(7) : Constant Pierre. Les facteurs d’instruments de musique. Paris 1893.
· Larigot : Catalogues de la collection de Bruno Kampmann.
· Site de Richard Charbit : http://www.orpheemusic.com.
· Anthony Baines: Brass Instruments. Their History and Development.
· Waterhouse William: “The New Langwill Index. A dictionary of Musical Wind Instrument Makers and Inventors”.
· Archives départementales du Bas Rhin à Strasbourg. Etat civil, recensements, annuaires, almanachs.
· Günter DULLAT « Metallblasinstrumentenbau ».
· Enrico WELLER « Der Blasintrumentenbau in Vogtland von den Anfängen bis zum Beginn des 20
Jahrhunderts ».
· Brevets : Archives de l’INPI : 26 bis rue de Saint Petersbourg, Paris 75008.
bonjour je possede un clairon ancien estampillé
RépondreSupprimerne simoutre
savez vous sa valeur?merci