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samedi 29 mars 2014

Instruments anciens : COUSINEAU Père et Fils facteurs de Harpes et de clarinettes à Paris ?

Une jolie clarinette en Ut à 5 clés de la collection de José Daniel TOUROUDE nous laisse songeur ; en effet elle porte la marque : "COUSINEAU Père et Fils à Paris".

C'est l'un des seuls instruments à vent portant cette marque que nous connaissons.

Seul le pavillon porte cette marque assez effacée. La clarinette est en buis, baguée ivoire à cinq clés carrées en laiton ; la facture est particulièrement fine en particulier le guide creusé dans le bulbe pour la clé de Mib.

Cette clarinette a sans doute été réalisée par un facteur inconnu (où par l'atelier de Cousineau ?) vers 1810.
Les COUSINEAU père et fils étaient des facteurs de harpes très célèbres. Le père Georges COUSINEAU (1734-1800) était facteur de harpes et de guitares, "mais il vendait instruments et œuvres musicales, témoin cette étiquette collée à l'intérieur d'une contrebasse à trois cordes" du musée de la musique de Paris : "Rue des Poulies, vis à vis la colonnade du Louvre, à la Victoire. Cousineau, luthier, fait et vend harpes, lyres, violon, violoncelle, contrebasses, pardessus de viole, alto-viols, guitares, violes d'amour, mandolines, sistres et autres instruments de musique. Il vend aussi des cordes de Naples et tient magasin de musique française et italienne. Son épouse (Madeleine RENAULT) grave la musique". (Constant PIERRE "les facteurs d'instruments de musique" 1)
Détails d'une harpe de Cousineau père et fils vendue à Drouot.


Il avait fait son apprentissage à Paris en 1750 chez le luthier François LEJEUNE : A la Harpe Royale" et obtenu son brevet de maîtrise en 1758. Très curieux il s'intéressait à toutes les nouveautés  et même à l'harmonica.
"En 1775, Cousineau s'adjoignit son fils Jacques Georges COUSINEAU (1760-1836), lequel entra le premier avril 1776, en qualité de harpiste, à l'orchestre de l'opéra, qu'il quitta le premier janvier 1811....En 1772 COUSINEAU père joignit à son commerce, la vente des pianos anglais, ce qu'il faisait savoir dans les papiers publics : "le Sieur Cousineau vient de recevoir des piano forte d'Angleterre des meilleurs facteurs". (1)
Jacques George COUSINEAU (BNF).
Vers 1780 Cousineau père remplace les crochets de harpes par des béquilles, ce mécanisme ne modifie pas l'axe de la corde qui tient ainsi plus longtemps l'accord.
Piano Forté portant la marque Cousineau. (Musée de Bruxelles)
"En 1781, il voulut donner à la harpe, la facilité de produire les ré, sol, do, et fa b et les ré, la et si # par l'adjonction d'un second rang de pédales, ce qui en portait le nombre à 14 et procurait 21 demi-tons, résultat que Sébastien ERARD devait obtenir plus pratiquement quelques temps après par le double mouvement des sept pédales ordinaires". (1)
"La leçon de harpe de la demoiselle d'Orléans" : par Jean Antoine GIROUST (1753-1817).
Représentation d'harpes de Cousineau dont une harpe d'enfant.
 En 1781 également Cousineau obtient le titre de "Marchand luthier de la Reine" et en 1784 il est nommé "Luthier ordinaire de la Reine". En 1789, la raison sociale devient "Cousineau père et fils, marchands luthiers à Paris".
Cousineau père acquiert en 1798 d'un amateur belge, Jean Michel RUELLE, le secret d'un mécanisme nouveau, les chevilles tournantes. Les demi-tons sont obtenus par la cheville même où sont attachés les cordes, sans le secours de la pince ou du crochet, par le mouvement de rotation de la cheville sur son axe.

Dessin des chevilles tournantes du Brevet de 1799. (INPI)
Mais l'inconvénient réside dans le fait qu'il y a des perturbations continuelles de la tension des cordes, qui ne peuvent garder l'accord et cela à nui à cette innovation. Jacques Georges Cousineau qui était de 1804 à 1809 le maître de harpe de Joséphine de Beauharnais avait réalisé un modèle à chevilles tournantes pour l'impératrice (voir l'illustration ci-dessous).
Harpe à chevilles tournantes pour l'impératrice Joséphine.
(Musée de la musique de Paris)
Après le décès de sa première femme Adélaïde BOURGUIGNON, il épouse le 4 avril 1815 à Paris Amélie Louise SEJAN (1797-1890), la fille d'un célèbre organiste Nicolas SEJAN (1745-1819), titulaire des orgues de Notre Dame.

Nicolas SEJAN organiste de Notre Dame de Paris.
Jacques Georges a écrit des sonates pour harpes et écrit une méthode célèbre pour la harpe. Le père Georges était membre fondateur de la loge : le Point Parfait et celle des Amis de la Liberté ; son fils a écrit une marche des Samnites pour le point parfait en 1802.

Jacques Georges Cousineau est décédé à 75 ans le 11 janvier 1836.

Atelier d'un luthier selon l'encyclopédie de Diderot.




lundi 26 novembre 2012

La famille HOLTZMAN à Paris, facteurs de harpes du XVIII° siècle.


Cette superbe harpe de Holtzman fils sera vendu à l'Hôtel Drouot à Paris par l'étude Aguttes le vendredi 7 décembre 2012. Je reproduis ici le texte du catalogue.

Outre le coté exceptionnel de cette harpe, cette vente nous permet de souligner le rôle essentiel  des commissaires priseurs, qui documentent leurs ventes et font régulièrement des recherches de fond sur les facteurs, vous le verrez c'est le cas dans cet article.

Harpe de Holtzman fils à Paris.

"Rare harpe à mécanisme à crochets, pour trente huit cordes et sept pédales.
La table porte trois étages de roses constituées de cinq percées circulaires, et est ornée d'un paysage lacustre, d'un entablement présentant des attributs de la Musique ou des chutes de guirlandes de fleurs. La crosse en bois sculpté, est laqué noir et doré, dans le goût de la Chine, et est ornée de personnages ou de pagodes. Chute ornée de feuilles d'acanthe et de baguettes rubanées, sur une console à fleurs et guirlandes de feuilles de chêne. Montant à cannelures. Elle est signée à l'encre : HOLTZMAN Fils à Paris, sur la table, à la jonction avec la console.
Fin de l'époque Louis XVI
H : 167 - L : 83 cm"

Travail de sculpture, de dorure, de laquage, de peinture...une merveille du XVIII° français.

Signature de Holtzman fils rue du Four Saint Germain à Paris.

"Holtzman fils :
La signature Holtzman fils rue du Four St. Germain à Paris correspond à la marque d' Henry Holtzman (reçu maître luthier en 1782), fils de Godefroy Holtzman, également maître luthier facteur de harpes, et de Marie-Charlotte Duchesne. Au moment du décès de la mère Holtzman en 1786 cinq frères et sœurs sont mentionnés, un enfant mineur prénommé Noel-Charles, Jean-Baptiste et Henry, tous deux maîtres luthier facteurs de harpes, le premier domicilié rue Saint-Antoine, le second rue du Four dans le quartier Saint-Germain-des-prés paroisse Saint-Sulpice, enfin deux sœurs, l'une mariée à un fondeur-ciseleur, l'autre à un facteur de harpes et de clavecins. En 1792, au moment de la mort de leur père, les cinq enfants sont toujours vivants ; Henry avait installé alors son atelier rue du Mail, paroisse Saint-Augustin, tandis que son frère, et confrère, Jean-Baptiste exerçait désormais rue Saint-Honoré. Dans le dernier tiers du XVIIIe siècle la notoriété des Holtzman fut grande ; rien d'étonnant au fait qu'une de leurs harpes soit mentionnée en 1784 lors de l'inventaire après décès des collections de la puissante marquise de Fleury, née Montmorency-Laval".


Détails.
 
Décor de Chinoiseries trés en vogue au XVIII°

 
 

"Dans les premières années du XVIIIe siècle le luthier bavarois Jacob Hochbrucker apporta une nouveauté technique à la harpe en développant un ingénieux système de pédales qui permettait d'augmenter à volonté chaque note musicale d'un demi-ton et ainsi de pouvoir jouer la musique dite “savante”, notamment les œuvres pour clavecins. Cette amélioration ouvrit à cet instrument de nouveaux horizons et lui permit de devenir au XVIIIe siècle, avec le piano forte, l'un des instruments de musique les plus appréciés par les personnalités de la haute aristocratie dans l'Europe entière et particulièrement en France. Marie-Antoinette elle-même s'essaya brillamment à cet instrument vers la fin des années 1770. Comme souvent dans les arts décoratifs de l'époque, les artisans parisiens du temps s'employèrent à faire de ces instruments de véritables objets d'art en décorant leurs caisses et consoles de motifs peints ou réalisés en vernis Martin et en confiant leur sculpture aux plus habiles artisans de la capitale".

Décors d'attributs de la guerre (en musique) et des arts.
"La harpe présentée fut conçue par l'un des meilleurs facteurs de harpes de l'époque. Sa perfection rivalise, voire surpasse, celle d'autres modèles répertoriés signés par les célèbres luthiers Georges Cousineau et Jean-Henri Naderman ; voir notamment une harpe de ce dernier conservée au musée Carnavalet à Paris (illustrée dans A. Forray-Carlier, Le mobilier du musée Carnavalet, Dijon, 2000, p.191, catalogue n°71). D'autres modèles réalisés dans le même esprit sont connus, citons particulièrement une première harpe signée Holtzman passée en vente à Paris, Me de Maigret, le 2 décembre 2011, lot 55 ; une deuxième portant la signature d'un luthier nommé Hermes se trouvait anciennement dans la collection Benchoufi (vente Sotheby's, New York, le 9 novembre 2006, lot 82 ; adjugée 54.000$) ; une troisième, signée Renault et Chatelain, appartient aux collections du musée de la musique à Paris (voir Guide du musée de la musique, RMN, 1997, p.97) ; enfin, une dernière signée Holtzman fut vendue chez Christie's à NewYork le 21 octobre 2004, lot 1191".
"....le hameau de la Reine à Versailles..."

"Harpe par HOLTZMAN à Paris, XVIIIe siècle, vendue à Drouot par l'étude de Maigret le 2 décembre 2012.
Ancienne collection Charles Enel (1880-1954), luthier à Paris
Matériaux : Epicéa, érable et vernis Martin
Marque au fer au sommet de la table et étiquette à l'intérieur de la console : « HOLTZMAN / Maître Luthier - Facteur de harpes, / demeure dans la grande rue du Faubourg / Saint Antoine, chez un Marchand de Vin, / au Roi de Siam, près de celle de Saint / Nicolas, au second ; il vend & fournit /
des Cordes de Naples et autres. / A PARIS »
H. 165 cm

Marque de Jean Baptiste Holtzman.
"La table en épicéa est ornée d'un décor en vernis Martin représentant des motifs floraux et des trophées d'instruments de musique, typiques de l'époque Louis XVI.
La console en érable s'appuie sur une colonne cannelée de même essence.
Le corps est composé de sept côtes d'érable ondé et repose sur une terrasse munie de quatre pieds forgés.
Système dit à simple mouvement. 7 pédales. 37 cordes".



"La harpe à simple mouvement fut le modèle sur lequel jouèrent Marie-Antoinette ainsi que la Duchesse de Guînes, pour qui Mozart composa son Concerto pour flûte et harpe en 1778. » (extrait du catalogue de l'exposition au Palais Lascaris, Nice, 2011)".

Bibliographie :


Jean Jeltsch, Denis Watel, Maîtrise et jurandes dans la communauté des maîtres faiseurs d'instruments de musique à Paris, in Revue d'organologie « Musique - Images - Instruments », n°4 ; Ed. Klincksieck, Paris 1999.
Robert Adelson, Erard et l'invention de la harpe moderne, 1811-2011
Berliner Musikinstrumenten-Musum (collectif), « Harfen », Berlin 1999