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dimanche 9 décembre 2018

BOSSARD-BONNEL marchands de musique à Rennes. Music Dealer in Rennes.

Qui ne connaît pas cette jolie affiche de Lotti, de la Maison BOSSARD -BONNEL de Rennes et de Rouen.

"J'ai donc voulu en savoir un peu plus sur cette grande Maison Rennaise...." Voilà ce que j'écrivais il y a dix ans sur Bonnel dans ce blog, depuis de l'eau est passé sous le pont et beaucoup d'informations et de documents circulent sur la toile en particulier sur le site de Roland Terrier, luthier à Mirecourt pour qui tout ce qui concerne la généalogie des luthiers de Mirecourt n'a pas de secret. Le site de Roland Terrier.
Et de plus j'ai pu acquérir à la dernière vente de Vichy une dizaine de fers à marquer de cette Maison. 
Fers à marquer les instruments de la Maison Bonnel
Marques de ces fers.
Il était donc grand temps de revoir notre article.

Comme de nombreux marchands de musique en France, la famille BONNEL trouve ses origines dans les Vosges, non loin de Mirecourt, dans le village de Dommartin-sur-Vraine. Et bien sur, dans cette famille il y avait des luthiers. Ce sont donc deux frères, Nicolas BONNEL (1795-?) qui s’installa d'abord, comme luthier et marchand de musique à Rouen en 1827, au 50 rue de la Ganterie, puis vers 1843 Joseph Pierre BONNEL (1799-1870) qui fit de même à Rennes. 
Etiquette de guitare de Bonnel Frères à Rouen VERS 1835
Les deux frères exerçaient ensemble à Rouen comme le prouve l'étiquette de guitare ci dessus : "A la renommée du bon marché, Rouen Rue Ganterie N°50, Magasin de Musique et d'instruments : BONNEL FRERES"

Nicolas fit venir pour l'aider des luthiers de sa famille comme son cousin François BRUGERE dit Malakoff (1825-1875). Il restera à la tête de la Maison Bonnel de Rouen jusque vers 1860. On pouvait lire dans le Bottin à cette date : " BONNEL Jeune, successeur de BONNEL Aîné, musique et abonnement, location de pianos, orgues et autres instruments". La succursale de Rouen restera très longtemps en activité.   
Annuaire commercial de 1847.











Si Nicolas BONNEL resta célibataire, Pierre Joseph BONNEL épousa Catherine Thérèse THÉVENIN (1800-1883) le 18 mars 1829 à Domvallier dans les Vosges. C'est dans le village natal de C.T. Thévenin que naîtrons les quatre premiers enfants du couple :  Anne Thérèse BONNEL (1829- ?), c'est elle qui est à l'origine de la branche BOSSARD, Charles Nicolas Joseph BONNEL (1831-1879), Charles Joseph Emile BONNEL (1835-1891), Armand Joseph Alphonse BONNEL (1839-1885). Ces trois fils luthiers resterons célibataires. La dernière fille Thérèse Clémentine BONNEL (1843-1897) naîtra à l'installation de la famille à Rennes. Car Pierre Joseph Bonnel, marchand d'instruments de musique ne devait pas être souvent présent à Domvallier avec sa famille car au trois naissance de ses fils, il est déclaré " absent depuis plusieurs mois". Cela s'explique par sa présence à Rouen depuis 1831.
Étiquette d'une guitare de HUEL à Rennes.
Guitare Bonnel Frère à Rouen.
Néanmoins à la naissance de leur dernière fille en 1843, toute la famille est réunie au 3 rue Royal et Joseph DEMARNE, 33 ans luthier est témoin. Pierre Joseph succède a Henri HUEL, luthier lui aussi né à Mirecourt en 1742. Élève de René LACOTE et passé par Paris H. HUEL était installé à Rennes.
Annonce publicitaire de 1779.
Le commerce de musique va vite prospérer, animé par le père et ses trois fils. 
Étiquette d'un violon réparé par Bonnel à Rennes.
Facture de 1873


Mais le père, Pierre Joseph BONNEL décède le 22 septembre 1870 à 71 ans. C'est le fils Emile BONNEL, habile luthier qui continuera la tradition et assurera la prospérité de cette grande Maison de Rennes, particulièrement  au niveau de la lutherie. Il fera venir de grands luthiers de Mirecourt avec qui il collaborera comme Charles Basile CLAUDOT (1824-1887), passé déjà par Rouen en 1852 avant son séjour à Paris et son installation à Rennes où il décéda, ou l'archetier Auguste LENOBLE  (1828-1907).    



















Violon d'Emile BONNEL vers 1883.
Les deux autres frères Charles Nicolas et Armand Joseph tous les deux luthiers collaboraient avec leur frère, mais Charles Nicolas décède à 48 ans le 26 décembre 1879,  puis c'est Armand joseph qui disparaît à 45 ans le 7 mars 1885. Il est a noter que lors de ces décès les témoins sont le  beau frère, Ernest PICARD (1842-1897), époux de Thérèse BONNEL, et le neveu Louis Joseph BOSSARD (1850-1856) qui était déjà impliqué dans l'entreprise car en 1879 il est Marchand d'instruments de Musique puis négociant en 1885.
Marque d'un piano
Mais avant tout la Maison Bonnel vendait tous les instruments et en particulier des pianos qu'ils faisaient réalisés et y apposaient leur marque, où représentaient les grandes marques comme Erard, Pleyel. Ils avaient un atelier spécifique pour réparer et entretenir ces pianos et avaient plusieurs accordeurs qui sillonnaient la Bretagne et la Normandie. 


Tambour (sans doute fournit par la Maison Gautrot de Paris)
portant la marque de Bonnel à Rennes
On peut reconnaître dans cette marque, l'empreinte de deux
fers achetés à Vichy. (Voir ci-dessus)
Pour les instruments à  vents la Maison BONNEL travaillait principalement avec la Maison GAUTROT de Paris qui deviendra ensuite COUESNON, aussi bien pour les bois et les cuivres..














vendredi 12 janvier 2018

Vichy : Lieu mondial, incontournable de ventes d'instruments de musique anciens. Vichy : inescapable world place of early musicinstruments' s sales.


La salle des ventes de Vichy est bien connue des amateurs d'instruments de musique anciens. Collectionneurs, musiciens, luthiers, experts, amateurs se donnent rendez-vous deux fois par an pour découvrir la perle rare en fonction de ses envies, de ses besoins car on y trouve tout depuis la mandoline à 10 euros pour décorer son salon au violon et archet pour virtuose dépassant allègrement les 500 000 euros.....et que de découvertes on peut y faire. C'est un lieu magique.













Guy et Étienne Laurent y règnent en maîtres entourés d'experts  
Cliquez sur ce lien si vous voulez en savoir plus sur Vichy enchères.

2017 a été l'année de tous les records pour les ventes de Vichy, tout d'abord avec la vente du 4 novembre 2017 consacrée aux instruments à vent, cordes pincées et guitare vintage.
Le record de la vente revient aux 10600 euros (13144 euros avec les frais), donnés pour cette guitare électrique Solidbody Fender en modèle Stratocaster datée de 1964.

Cette guitare mythique solidbody (sans caisse) de Fender  modèle Stratocaster (le modèle qui a suivi la Télécaster), série L45117 couleur Sunburst (Échappée de soleil...) datée du 2 septembre 1964 ....dont le son est parfaitement reconnaissable même pour un saxophoniste comme moi !
La vidéo concerne une stratocaster, de la même période que celle présentée à Vichy qui provenait d'un musicien amateur qui "transmettait " à un autre musicien son plaisir de jouer sur ce bel instrument.
Une autre très belle guitare archtop (construite comme une guitare acoustique avec une table bombée) Gibson (l'autre grande marque mythique) ES175 de 1968, elle aussi de couleur Sunburst vendue pour 5000 euros (6200 avec les frais).
Là je connais encore mieux car c'est du "mythique" mais de jazz .....Presque tous les grands guitaristes de jazz ont joué sur cette guitare même s' ils ont évolué vers d'autres modèles. Pour le plaisir écoutons Joe Pass.


Autre période, autre époque, autre musique avec cette guitare battente (avec une caisse en forme de coque de bateau ou que l'on jouait en frappant les cordes) de Gaëtano Vinaccia ("dit "Gaetano I", fils et élève d'Antonius Vinaccia le célèbre facteur de mandolines, perpétua la tradition de la lutherie napolitaine populaire de qualité") faite à Naples en 1848 et qui a fait 3600 euros (4464 euros avec les frais).

Trois instruments différentes est déja nous avons fait un grand voyage....c'est cela Vichy.
Et en plus pour les chercheurs on trouve des tas de trucs par exemple ce beau hautbois  a 12 clés en argent et poinçonnées, anonyme c'est à dire qu'il n'y a pas de marque de fabricant....
Toutes les clés portent le poinçon de petite garantie pour Paris "Tête de sanglier" donc datable aprés 1838 (ce qui n'est pas étonnant quand on regarde sa facture), mais surtout du poinçon de fabricant de Jean Louis Buffet (neveu).....c'est à dire de Jean Louis Buffet, qui devient Crampon vers 1843 ....et tient ce poinçon en losange a été insculpé (enregistré au bureau de garantie de Paris) en juillet 1844 et "biffé" (c'est à dire supprimé le 15 février 1856). Donc ce hautbois qui au départ est un bel instrument "anonyme"...devient un instrument de Buffet-Crampon de la premiére période et peut être datée "vers" 1844 d'où l'intérêt qu'il a succité auprés des musiciens et des collectionneurs passant d'une estimation de 1000 euros à une adjudication de 2601 euros (3225 euros avec les frais). 
Buffet Crampon de 1844 à 1856
Paris aprés 1838. Tête de Sanglier

Vous avez des instruments de musique avec des parties en argent et poinçonnées n'hésitez pas à nous contacter.

Vous voulez en savoir plus sur La famille Buffet Crampon


Changeons de domaine avec ce superbe Sarrusophone contrebasse en Ut de Gautrot Marquet. Cet instrument " inventé par Pierre Louis Gautrot (1812-1882) en 1856, dont le nom vient de l'hommage rendu par Gautrot à Mr Sarrus, chef de musique au 13éme de ligne qui lui aurait soumis l'idée de remplacer les hautbois et les bassons des orchestres militaires par des instruments en métal au timbre plus puissant".
Pour en savoir plus sur cet instrument Cliquer sur ce lien.
Adjugé 5000 euros (6200 avec les frais), il portait la marque de Gautrot Marquet, nom de Gautrot associé avec celui de son épouse qui caractérisait les instruments de haut de gamme. On était galant à cette époque !


Passons aux flûtes avec celles de Laurent, d'abord une flûte en cristal à 4  clés. C. LAURENT A PARIS 1819. Breveté (Cursive) qui n'était pas dans un parfait état ce qui explique sans doute son prix "modeste" pour une flûte de ce célèbre horloger, 8000 euros (9920 avec les frais).


Une nouvelle flûte de C. Laurent répertoriée dans la formidable thèse de Montserrat Gascon sur ce facteur très inventif.
Et le soudain intérêt pour une flûte en bois (palissandre) de ce même facteur à 5 clés argent non poinçonnées qui a atteint les 2600 euros (3224 euros avec frais). Il y a de grandes chances que l'on retrouve ces deux flûtes dans une grande collection américaine.....
Vous voyez en regardant quelques instruments vendus à Vichy on peut vraiment découvrir plein de choses...et là je n'évoque que les vedettes de la vente, mais j'aurais pu en évoquer d'autres moins "bankables",mais très sympas comme cet orgue mécanique à cylindre de Jacques Ullmann vendu par la Maison V. Marchent avec huit cylindres de 8 morceaux chacun.
Vous voyez on est loin de l'Iphone, la musique cela se méritait....Dans un prochain article j'évoquerai la vente d'archets et de cordes de la collection Millant.
Et si vous voulez lire cet article en musique je vous mets laisse avec Emmanuel Pahud.

mercredi 13 septembre 2017

"La famille Kretzschmann de Strasbourg facteurs d'instruments de musique, à vent en cuivre". "The Kretzschmann family from Strasbourg, brass wind music instruments makers".

Karl Gottlob KRETZSCHMANN est né en Allemagne, à Markneukirchen (Saxe) le 19 avril 1777. Il était le fils du facteur Johann Gottfried KRETZSCHMANN de Markneukirchen et d’Eva Rosina GOETZ et appartenait à la célèbre famille du « Vogtland » qui a donné de nombreux facteurs d’instruments de musique. Il est arrivé vers 1809 à Strasbourg, sans doute accompagné d’un neveu, Charles Gottlob KRETZSCHMANN, facteur d’instruments, né à Neukirchen, décédé à 25 ans le14 juin 1813 à Strasbourg. Le père de ce neveu, Adam KRETZSCHMANN, était aussi facteur en Saxe.
Marque de Charles Kretzschmann.
Karl (Charles) Gottlob, qui avait francisé son prénom, épousa vers 1810 Suzanne ANNECKER (1790-1855), fille d’un boucher installé à Wasselonne en Alsace. Ils eurent quatre enfants dont les deux premiers  décédèrent en bas âge : Charles Gottlob (1812-1814) et Caroline (1813-1817).
Signature de Charles Kretzschmann père.
Le second  fils, Charles Auguste KRETZSCHMANN, né à Strasbourg le 16 octobre 1818 prendra la succession de la Maison en 1842 à la mort de son père. Quant à Frédérique Wilhelmine (Guillemette) KRETZSCHMANN, née le 23 décembre 1821 à Strasbourg, célibataire,  elle décédera le 12 septembre 1860 à Scharrachbergheim dans le Bas Rhin. Dès son arrivée à Strasbourg en 1809, Charles Kretzschmann père se déclara fabricant d’instruments à vent et s’établira au N° 5 de la rue Saint Hélène, adresse des Kretzschmann père et fils pendant toute leur activité. La fabrication de l’atelier comportait tous les instruments à vent en cuivre : cornets, trompettes, cors, trombones, ophicléides et utilisait exclusivement le système allemand de barillets rotatifs.
Pavillon d'un cor naturel de Charles KRETZSCHMANN père.
(Collection R. Charbit)
Même si la production de Charles Kretzschmann fût très influencée par la facture allemande, elle restera par sa diversité et sa créativité d’esprit français : les trompettes à clés, circulaires, demi-lune, les buccins, ophicléides  montrent que ce facteur de province était au niveau des meilleurs facteurs parisiens. A l’exception peut-être d’un ou deux facteurs lyonnais, aucun facteur de cuivres de province, ne produisait une telle variété d’instruments en ce début du XIXe siècle.
Petit cor de poste (Vente de Vichy juin 2006) 
 Grand bugle à 7 clés en Fa en forme de demi lune de Charles KRETZSCHMANN
à Strasbourg. (Collection Richard Charbit)
 

Trompette demi-lune (collection B. Kampmann)
Jean FINCK (1807-1858), autre facteur de cuivre installé à Strasbourg, a sans doute été formé dans l’atelier Kretzschmann, puisque il ne quitta pas Strasbourg et se déclarera tourneur de 1807 à 1817, puis seulement à partir de cette date, fabricant d’instruments à vent. Seul Kretzschmann avait la compétence à Strasbourg pour former un élève. La collaboration entre les différents facteurs strasbourgeois ne s’arrêtera pas là, comme le montrent ces deux cors naturels marqués « Bühner et Keller » et « Dobner », visiblement fabriqués par Kretzschmann.
Cor naturel de Bühner et Keller fait par Charles Kretzschmann (collection RP)

Cor naturel marqué Dobner à Strasbourg sans doute fabriqué
 par Kretzschmann (Collection Richard PICK)
A la mort de Charles Gottlob KRETZSCHMANN, le 18 février 1842 à Strasbourg, son fils unique Charles Auguste KRETZSCHMANN, âgé de 23 ans prit logiquement la suite de son père. Il devait avoir été formé très tôt dans l’affaire, puisque que dès 1844 il participa à l’Exposition de Paris, où il présenta des bugles à Cylindres, un bugle basse et un bombardon.
Signature de Charles Auguste Kretzschmann (1818-1888)

Cornet à pistons en ut/mi b (N° 625 de la collection Bruno KAMPMANN)
Il obtiendra le 1 mai 1850 un brevet de 15 ans N° 9850  « Améliorations et changements apportés au mécanisme des cylindres rodiques qui sont applicables à tous les instruments de musique tels que cornets, clairons etc…. » En fait C.A Kretzschmann était un partisan « du système à cylindres rodiques » auquel il trouvait de multiples avantages, dont celui de laisser passer l’air d’une façon plus naturelle et sans obstruction ; en revanche il voulait améliorer son inconvénient majeur, la fragilité et avait conçu un « couvercle manivelle»  qui fonctionnait sans friction. Selon Bruno KAMPMANN « ….l’idée est très proche de la walzenmaschine brevetée par CERVENY postérieurement en 1873. La particularité unique est que les ressorts de rappel sont inclus dans les barillets, et non situés dans un rotor extérieur ». Si vous voulez en savoir plus (et si vous parlez allemand) ce système est détaillé à la page  35 de l’ouvrage de Günter DULLAT « Metallblasinstrumentenbau ».
Trompette en sol à trois barillets et ton de sol, 
appliquant ce brevet, en particulier le couvercle manivelle
(N° 528 de la collection Bruno KAMPMANN)
Il récidivera en 1856 et obtiendra le 23 juin un brevet de 15 ans (N° 28038) pour la fabrication d’un « système de pistons à mouvement horizontal avec pression verticale, applicable à tous les instruments de musique en cuivre ».


















« Clairon chromatique baryton en si utilisant ce nouveau brevet » (Musée de la Musique à Paris) et schéma expliquant ce nouveau système  à pression verticale et mouvement horizontal. Günter DULLAT « Metallblasinstrumentenbau ».

A cette date, il faisait partie de la coalition des facteurs d’instruments qui luttera contre l’hégémonie du grand Adolphe SAX. Nous n’allons pas « répéter » ces procès fastidieux entre la coalition et le « pauvre Adolphe Sax martyr de tous ces cupides facteurs d’instruments », discours convenus et entretenus par des écrivains bien connus, comme Oscar Comettant et le Comte Ad de Pontécoulant, discours repris en cœur dans tous les documents publiés sur Sax, même actuellement ; ouvrages dans lesquels KRETSCHMANN est cité très rarement, sinon pour souligner « sa cupidité » et son « incompétence ».  Pourtant il existe un nombre impressionnant d’ouvrages reprenant l’ensemble des procès opposant Kretzschmann à Sax, disponibles à la Bibliothèque Nationale de France, montrant que le combat fût long, âpre et que l’issue ne fût pas si favorable pour Sax, puisque en appel, Kretzschmann fut condamné non pas pour contrefaçon, mais pour…recel de 4 instruments produits par Kretzschmann comme preuve d’antériorité au brevet Sax de 1845 et pour les avoir introduit en France. 
Le Grand Adolphe Sax.
Les procès entre A. Sax et C.A. Kretzschmann : procès longs et pas particulièrement flatteurs pour le "Grand Sax".


Reprenons les éléments essentiels de ces procès. Ch. A. KRETZSCHMANN fut d’abord cité comme témoin dans le procès qui opposa GAUTROT à SAX, mais son témoignage ne fût pas retenu. Aussi, lorsqu’il fut cité comme témoin dans le procès  qui opposa BESSON à SAX, il produisit trois instruments, fabriqués par son père (3 ophicléides altos à 3 pistons parallèles vendus en 1839 et 1841 dont les propriétaires étaient suisses, et vosgiens) et un quatrième, vendu par Kretzschmann fils en 1843 (ophicléide alto à trois pistons), fabriqué avant le brevet Sax du 13 octobre 1845, qui revendiquait l’invention :
« Des instruments ayant le pavillon en l’air et les pistons parallèles au tube de l’instrument ». 
Sax fait saisir ces quatre instruments, ainsi que les documents prouvant la vente à la date indiquée, pour contrefaçons. Comme il était difficile de contredire les dates, en particulier celles qui concernaient les instruments de Kretzschmann père décédé en 1842, le tribunal décida que les instruments auraient été modifiés après 1845 mais par qui ? Le tribunal n’osa accuser ni Besson, ni Kretzschmann, puisque les instruments étaient arrivés au tribunal dans des conditions particulières. Nous voudrions décrire avec quels soins les propriétaires avaient fait parvenir au tribunal les instruments, propriétaires qui c’étaient même déplacés durant les procès pour témoigner en faveur de Kretzschmann.
Prenons le cas de «  l’ophicléide alto à trois pistons parallèles, fabriqué par feu Mr KRETZSCHMANN père et vendu par lui le 19 octobre 1841 à Mr Louis Hoffmann-Vulliemoz à Lausanne, canton de Vaud (Suisse). Cet instrument a été produit en justice par son propriétaire actuel, Mr François Blanc, huissier à Lausanne, à l’appui de sa déposition du 30 juillet 1858. Pour établir l’origine et la date exacte de cet instrument, Mr KRETZSCHMANN fils avait produit :
·         Les livres de commerce de feu son père.
·         Les lettres relatives à cet instrument de Mr Louis Hoffmann-Vulliemoz.
·         Une déclaration notariée du 26 mai 1858 de MM Louis Hoffmann-Vulliemoz, François Blanc propriétaire de l’instrument, David Thuillard, Philippe Pflüger, Frédéric Allamand, Jacques Lauffen, Jacques Hoffman, Henri Blanc.
Les signataires de cet acte ont déclaré « qu’étant tous membres du corps de musique militaire de Lausanne, dirigé par le lieutenant Hoffman, ils ont vu cet instrument dans leur musique dès l’année 1841. Cet instrument alors nouveau pour eux, fut de leur part l’objet d’un examen particulier et leur a laissé un souvenir parfaitement distinct, notamment par la position des pistons placés tous trois ensemble dans la même direction parallèle au tube du pavillon ». Ledit instrument reconnu cacheté par un notaire ». (5)
Le même traitement étant fait pour les trois autres instruments, il faut croire que Mrs Kretzschmann et Besson bénéficiaient d’un solide réseau de « complices », puisque le 19 juin 1862 ils étaient accusés « non pas d’avoir contrefait les quatre instruments, mais de les avoir introduits en France et recélés, sachant qu’ils étaient contrefaits ». (5)
On comprend mieux, pourquoi Constant PIERRE fut aussi sévère avec A. SAX  dans son ouvrage « Les facteurs d’instruments de musique ».
« A. SAX déposa de nouveau son bilan en 1873, après une période particulièrement brillante, pendant laquelle il avait certainement vendu beaucoup d’instruments, reçu plus de 500 000 frs d’indemnité du procès Gautrot, encaissé nombre de primes des facteurs qui avaient sa licence pour faire des instruments imposés sous son nom dans l’armée. Comment donc s’il n’y eut des dépenses excessives, des remises exagérées, des frais de publicité énormes, des panégyristes largement rémunérés, s’expliquer un tel désastre. Avec le nouveau régime, Ad. SAX ne retrouva pas l’appui que lui avaient prêté les fonctionnaires de l’Empire, la lutte redevint égale et toute pression officielle cessant, les facteurs purent écouler les instruments de leurs systèmes, sans être contraints comme auparavant, de se borner à la confection des types réglementaires imposés et dénommés à l’instigation d’Ad. SAX ». (7)
Quant à Ch. A. KRETZSCHMANN, il se retira des affaires vers 1860 : « Mr KRETZSCHMANN s’est retiré des affaires ; mis en possession par son père d’une fortune relativement considérable, augmentée encore par sa propre industrie et suffisante aux besoins de son existence ». (5)

On remarque également que son brevet de 1856 : « nouveau système à pression verticale et mouvement horizontal » avait pour but de répondre au brevet SAX de 1845, même s’il ne rencontra pas un franc succès.
Il se retira à Scharrachbergheim, petite commune du Bas Rhin de 1000 habitants, située à 21 kms de Strasbourg. C’est là qu’il décédera le 12 octobre 1888 à l’âge de 70 ans, sans descendance. (*)
C’est Achille (François Pascal) GALLICE qui prendra la succession de la Maison KRETZSCHMANN dans les années 1860. Achille GALLICE était né à Briançon le 5 décembre 1832, il était le fils de Pascal GALLICE ébéniste à Lyon. Avant son installation rue des Frères, il devait travailler pour Jean Chrétien ROTH (Successeur de Dobner et de la Maison Bühner et Keller), puisque lors de son mariage le 19 juillet 1856 à Strasbourg avec Pauline SCHATZ, fille d’un brossier de Strasbourg, « J.C. ROTH, 40 ans facteur d’instruments et Jacques ROTH, 33 ans amis de la famille » en furent les témoins.

Achille GALLICE exerça son métier de « facteur d’instruments en bois et en cuivre » de 1867 à 1886 à la même adresse, 14 rue des Frères qui deviendra en 1880 la « Brüderhofgasse ».

Bibliographie :

(1) : Comte Ad de Pontécoulant : Organographie. Essai sur la facture instrumentale. Art, Industrie et commerce. Paris 1861.
(2) : Oscar Comettant : Histoire d’un inventeur au XIX° siècle. Adolphe Sax, ses ouvrages et ses luttes. Paris 1860.
(3) : Malou Haine : Adolphe Sax (1814-1894) Bruxelles.
(4) : Jean Pierre Rorive : Adolphe Sax (1814-1894), Inventeur de génie. Edition Racine.
(5) : Cour de Cassation. Mémoire ampliatif pour Mr Ch. A. Kretzschmann contre M. A. Sax. 1863 chez
Silbermann.
(6) : Cour de Cassation, chambre criminelle : Besson, Kretzschmann contre Sax : BNF 4 FM 16527.
(7) : Constant Pierre. Les facteurs d’instruments de musique. Paris 1893.
·         Larigot : Catalogues de la collection de Bruno Kampmann.
·         Site de Richard Charbit : http://www.orpheemusic.com.
·         Anthony Baines: Brass Instruments. Their History and Development.
·         Waterhouse William: “The New Langwill Index. A dictionary of Musical Wind Instrument Makers and Inventors”.
·         Archives départementales du Bas Rhin à Strasbourg. Etat civil, recensements, annuaires, almanachs.
·         Günter DULLAT « Metallblasinstrumentenbau ».
·         Enrico WELLER « Der Blasintrumentenbau in Vogtland von den Anfängen bis zum Beginn des 20
Jahrhunderts ».
·         Site de Richard Pick : http://www.pick-et-boch.com/

·         Brevets : Archives de l’INPI : 26 bis rue de Saint Petersbourg, Paris 75008.