Affichage des articles dont le libellé est Duplaix. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Duplaix. Afficher tous les articles

lundi 21 avril 2025

PIANOS VICTORY - " Il faut des pianos sur les champs de bataille ! L’histoire méconnue des pianos Victory ".

 

par José-Daniel Touroude

Avec la participation d’Albert Rice (musicologue USA), de Théo Taillasson (restaurateur du piano) de René Pierre et Bernard Duplaix  (musiciens)

« Envoyez des pianos à travers le monde, par terre, par mer ou par air » et c’est ainsi que des pianos sont tombés du ciel ponctuellement en parachutes sur la plage et dans différents endroits dans le monde (mais la plupart ont été débarqués, il ne pleuvait pas des pianos quand même !)














Pourquoi cet ordre incongru ? : pour entretenir le moral des armées :

Les troupes américaines en 1944-45 se déployaient à travers le monde en guerre et la musique était essentielle entre deux assauts.

Bien sûr il y avait les fanfares et des brass band, parfois des harmonies (fanfare + les bois) voire de véritables big bands de jazz en vogue dans les années 40 jouant du jazz et du swing comme le Glen Miller Army Air Force Band omniprésent avec son pianiste Mel Powell ou les Andrew Sisters avec leur tube Boogie Woogie Bugle Band etc…



Une anecdote : Le jeune Dave Brubeck sera dispensé de l’assaut meurtrier des Ardennes à condition de constituer un orchestre et de jouer avec son piano Victory dans tous les cantonnements, parfois attaqués, avec sa camionnette et sa scène portative… Peut-être que Dave a été sauvé aussi grâce à un piano !

Mais pour faire chanter toute la troupe avec des airs à la mode et retrouver l’ambiance de chanter ensemble, l’incontournable Lily Marleene récupéré par la capitaine Marlène Dietrich (armée de Patton) ou des chansons de Frank Sinatra, de Bing Crosby ou les célèbres mélodies des Gershwin … il fallait des pianos pour ces moments de détente. 

Marléne Dietrich sur la scène de l'Olympia de Jarny en Lorraine
le 10 novembre 1944 devant un parterre de soldats américains



















Quel genre de musique ? c’est avant tout du jazz

Bien sûr le jazz avait quelques clubs et avait été amené par les militaires afro-américains en 1917 puis entre les deux guerres mondiales (Josephine Baker, Sidney Bechet, les Zazous etc…Django Reinhard et le hot club de France…) et ce fut la grande époque du ragtime mais cela restait pour des initiés passionnés. En 1944-45 le jazz plus swing était la musique américaine des vainqueurs.

Mais envoyer des pianos sur les divers champs de bataille mouvants n’était pas aisé : un piano normal envoyé sur le front en camion, bateau ou par avion se briserai. Donc il fallait faire un piano adéquat, par un fabricant spécialisé, avec des caractéristiques spéciales précisées dans un cahier des charges novateur où le bois solide serait le matériau dominant.

  • ·     Une caisse en bois adéquate renforcée protégeant le piano même parachuté ou malmené par le transport.
  • ·       Un piano qui utilise des matériaux solides donc lourd (250 kg), stable avec des pieds adaptés, avec une qualité minimum mais à bas coût (moins de 500 $).
  • ·       Un piano facile à transporter de longueur maximum d’1m 50, d’1m de haut, de 60 cm de profondeur, avec 4 poignées pour le transporter (facilement ? par 4 soldats. Commentaires : avec la caisse chaque GI portait 100 kg quand même !)

Usine de pianos Victory

  •      Un piano rustique en bois épais exotique dur pouvant résister aux chocs physiques, thermiques et aux intempéries. (Le cylindre ou couvercle, qui protège le clavier et les touches, doit être aussi en bois épais, un pupitre intégré bien fixé….
  •      Un piano droit adéquat, facile à produire rapidement à la chaine, avec des matériaux simples et solides : le clavier en bois avec des touches recouvertes de plastique, des cordes en acier entouré de fer incassables et deux pédales.
  •      La table d’harmonie, la pièce délicate essentielle, qui est en bois et sert à amplifier le son et corriger les harmoniques du son, doit être rustique mais avec une certaine qualité minimum.
  •      Des couleurs militaires variées puisque le donneur d’ordre est l’armée :  le piano Victory vertical est surtout vert olive pour l’armée de terre, mais aussi gris pour la Navy, bleu pour les gardes –côtes, noir ébène pour les officiers.
  • ·    Il doit être livré avec kit d’accordage, des pièces de rechange et des partitions de jazz ! (et quelques cantiques pour les cérémonies religieuses. 

Transport d'un piano Victory dans sa caisse.

Qui va relever le défi de la production de ces pianos ?

Un allemand nommé Henrich Steinweg émigré à New York était un fabricant de piano de qualité et important (un millier de salariés) américanisant son nom en Steinway & sons. Il avait une usine à Hambourg en Allemagne (ville rasée par les bombes incendiaires utilisant aussi le napalm) et une autre aux USA à New York. 

Pendant la deuxième guerre mondiale, ce fabricant connait une pénurie de matières premières, une demande très faible de piano de qualité donc Steinway est obligé à une reconversion de ses activités en participant à l’économie de guerre en faisant un peu de tout en bois (beaucoup de planeurs en bois, crosses de fusils, avions leurres en bois, cercueils).

Planeur Waco CG4-A. Le savoir-faire de Steinway dans le domaine du bois est mis
à profit pour fabriquer les pièces complexes de l’appareil


L’armée demanda à la firme « Steinway & sons » des pianos droits adaptés selon les recommandations émises. Ce qui fut fait pour arriver à la production totale de 2436 pianos nommés Victory. Les croquis du piano « Military Victory » ont été réalisés à partir de 1940, ceux du « Military-Regency Victory » en 1941 et « Victory » en 1942. Le croquis sur lequel est basé le piano droit Steinway est le croquis 1051a daté du 13 août 1942 pour le modèle Vertical 40 (« Victoire militaire ») (référence sur les pianos Steinway, Roy F. Kehl et David R. Kirkland, The Official Guide to Steinway Pianos, Montclair, NJ : Amadeus Press, 2011). Le numéro « Y » apparaît sur certains croquis de différents modèles. 

Malgré leur robustesse, et leur dispersion à travers le monde, il en reste peu.

En croisant nos sources, il n’y aurait plus que 6 pianos Victory référencés en France : 1 au musée mémorial de Caen, 2 restaurés par les Ateliers Hanlet, 1 autre restauré par Gérard Fauvin, 1 restauré à Bourges, plus celui -ci par Théo Taillasson, ce qui fait un total de 6 pianos Victory restaurés en France, donc relativement rares pour des collectionneurs. Guy Laurent responsable des enchères à Vichy, haut lieu de vente des instruments de musique au niveau mondial, n’en n’a jamais vu !



Puis vint l’armistice ! mais des pianos furent encore envoyés pour égayer le quotidien des militaires qui avaient relevés les vétérans avec la mission de protéger l’Europe pendant la guerre froide et qui s’ennuyaient parfois dans les bases américaines.

La musique « nous a empêché de devenir fous » diront les vétérans, « un soldat ayant le moral est un bon combattant » diront les gradés « la musique repousse l’ennui du casernement et la dépression » diront la relève….


La fascination pour l’Amérique

L’influence culturelle et consommatrice des USA aussi bien sur les valeurs que sur les produits américains (les jeans, les chewing-gum et coca cola distribués, les sodas et l’alcool, les cigarettes blondes etc… ) est fondamentale.

L’exportation de la culture américaine envahit la jeunesse européenne, l'American way of life, les sports américains, les bandes dessinées comics, les films, les westerns, le plastique, la littérature, les médias avec la radio et la télévision naissante, la publicité, l’art…

 Jazz et arts abstraits

Le jazz circule dans des voitures avec hauts parleurs à travers la France, véritable acculturation et découverte pour la majorité du peuple français, symbole aussi du renouveau culturel pour la jeunesse soucieuse du progrès et de l’avenir. La plupart des variétés, musiques de film français, fêtes, bals, boites sont imprégnées de la culture jazzy.

Le jazz est déversé dans les radios américaines en continu, des milliers de vinyles créent la musique de l’émancipation, du modernisme, de la victoire et sera une des constituantes de l’impérialisme culturel, du soft power américain.

Symbole de la libération, l’inondation des V discs gratuits de tous les jazzmen seront détruits après la guerre pour les vendre ! les USA pays du business aussi….


C’est ainsi qu’après la guerre, pour l’environnement des bases américaines stationnées en Europe, la musique, avec le jazz puis le rock en roll, devenait incontournable. Quelques pianos Victory du front ont survécu dans un état pitoyable et d’autres neufs en stock ont été acheminés pour les bases américaines jusqu’en 1954. En 1967 les bases américaines partirent de France, les GI emmenant de bons souvenirs et beaucoup de jeunes françaises (dont ma cousine !)

Interpellons les souvenirs de témoins qui ont connu cette époque

Par les bases américaines, ils ont découvert le jazz et cela a changé leurs vies. 

Bernie nous raconte : Pour notre génération, gamin nous allions écouter les formations de jazz à CHAB (Chateauroux Air Base) qui avait un big band de qualité dirigé par le saxophoniste ténor Billy Harper. Quel choc ! Elève au conservatoire, j’étais fasciné par la culture américaine. Les musiciens étaient talentueux et accessibles et j’ai rapidement joué avec eux. Et puis que de concerts avec des géants du jazz qui faisaient les tours des bases américaines comme Art Farmer, Benny Golson, Bud Powell, Dexter Gordon, Chet Baker…

On avait constitué notre orchestre de jeunes jouant du New Orléans et Dixieland dans les boites et bals, puis suivant l’évolution du jazz et des disques qu’on écoutait sans cesse comme Cannonball Adderley, Miles Davis, Phil Woods avec qui je jouerai plus tard aussi, John Coltrane, Bill Evans, Eric Dolphy  etc… j’ai changé de style mais cela a surtout changé ma vie … Après le conservatoire de Paris, je devins musicien professionnel où sur scène, en studio d’enregistrement ou en enseignant, le jazz sera souvent présent.


René Pierre autre témoin :  " Je suis né à Nancy, en Lorraine après la guerre et à l'adolescence nous avons fait connaissance avec  le jazz et avec quelques amis nous avons créé un orchestre " les Jazz Brownies ". C'était l'époque des Yéyés et de l'émission célèbre de Franck Ténot et Daniel Filipacchi "pour ceux qui aiment le jazz ", ou cette  musique venant des States était populaire et surtout faite pour danser. De plus  la Lorraine est la région française qui a accueilli le plus grand nombre de bases. Elle possédait 6 bases aériennes principales permanentes : deux réservées aux forces canadiennes, les 4 autres à l'US Air Force. De plus s'y ajoutaient des bases aériennes secondaires de dispersion, utilisables temporairement par les différentes forces alliées de l'OTAN sans préférence.



Nous avons découvert par hasard la " Red Cross " de l'armée américaine dans une grande villa de Nancy, et là on nous prêtait des instruments, les militaires US jouaient et nous invitaient à les rejoindre pour jammer ; c'est bien là que notre "carrière de musicien amateur" est né. Tout cela dans un environnement favorable des sixties, des bals universitaires où toutes les vedettes du jazz étaient invitées à se produire : Memphis Slim, Guy Lafitte, Stéphane Grappelli, Lou Bennet, Kenny Clark, René Thomas, Claude Nougaro, Eddy Louis, Claude Luter, Maxime Saury,  Marc Laferrière, Cris Barber…et les bases américaines où on venait nous chercher pour animer des soirées à Toul, Verdun, Etain…dans les foyers des bases, où nous croissions sur scène Chet Baker , Johnny Griffin…et les clubs de Jazz, comme le Roxy à Nancy, le 4 cats club de Metz, l'Aubette de Strasbourg, fréquentés par tous les militaires américains et d'excellents musiciens ricains qui nous prenaient sous leurs ailes " Little Frenchies "….Une période magique où nous n'avions aucun complexe, même si on ne maitrisait pas bien les II V I.mais juste on avait de la feuille .....et en plus on nous payait". 

Autre souvenir personnel :

Dans un Royan bombardé à 85%, ma mère Gisèle Touroude résistante et jeune professeur de musique après-guerre a réussi à avoir un piano victory de couleur indéfinissable « un gris bleu pisseux » provenant d’une base (je crois vers la Rochelle où étaient réfugiés mes grand parents) Ma mère était pratiquement une des rares accompagnatrices des chanteurs et autres musiciens en tournées en Charente Maritime. Ce piano était une vraie « casserole », un piano de saloon (mais un Steinway quand même disait ma mère !) mais qui fut utile car il a permis de débuter avec ses premiers élèves avant d’en louer un plus correct à Saintes (17). Ce piano américain a fini en bois de chauffage pendant l’hiver glacial de 1947 vu l’état de la maison et l’absence de chauffage à Royan à cette époque ! je sais cela fait mal ! surtout au prix actuel proposé par des musées et collectionneurs.

Mais en voilà un, qui lui renait …

L’histoire singulière du piano Victory restauré en Charente Maritime.

Un Victory Vertical sur la plage. Photo National Archives



Le Victory Vertical de Steinway & sons n’est pas arrivé à Rochefort (17) en parachute comme certains mais a été retrouvé par Théo Taillasson, historien d’art, intéressé par la facture instrumentale qui travaille chez Remy Babiaud à Rochefort (17) entreprise qui fabrique et restaure des pianos.  Théo Taillasson en voulait un…  il lance une bouteille à la mer (normal pour un habitant de l’ile d'Oléron !) et poste une annonce sur internet et en Décembre 2023 un vendeur italien de Rome le contacte : il a un Victory Vertical à vendre en Italie qui fut de couleur vert olive de l’armée. Après une visioconférence, Théo fonce en Italie et après 30 heures de route, revient à Rochefort.

Ce piano n’est pas une épave, il n’a pas fait le débarquement en Sicile (1943-44) mais est arrivé pour fêter la libération (25 avril 1945) d’où son bon état relatif. Les forces américaines sont restées en Italie. Il fut restauré une première fois à Rome et parait jouable.

Etiquette de restauration (CP TT)




















Le piano vertical Victory ou modèle droit, modèle 40, a été fabriqué par Steinway du 27 juillet 1939 au 5 mai 1954.  Ce piano est un Steinway droit modèle Victory n° de série : 317874, la table d’harmonie Y 369 et le cadre Y 285n en vert olive a été produit début 1945 à New York.

Ce piano a été livré aussitôt à l'armée américaine et arrive pendant l'été 1945, à la fin de la guerre en Italie. Ces dates sont toujours indiquées dans les livres de stock de Steinway. Kehl et Kirkland décrivent également ce modèle page 223 : « Une ligne de production spéciale était celle du piano de campagne GI [General Issue], pour les contrats militaires en temps de guerre : Victory, croquis 1051a (1942-1946, 1948-1953) et Regency Victory, croquis 1071a (1942-1943). Les pianos de campagne GI étaient fabriqués à partir de modèles de caisses artistiques reconnus portant les mêmes numéros de croquis, mais étaient renforcés pour un usage militaire intensif par des cales et des fixations sous les touches pour le transport. De nombreux pianos de campagne GI étaient de couleur vert olive. Certains surplus de caisses 1051a, de couleurs non militaires, ont été achevés jusqu'en 1954 »

Théo Taillasson et José-Daniel Touroude













Parole au restaurateur de ce piano.

Concernant la traçabilité du piano, en 2023 le piano est racheté par un revendeur Italien à Rome (personne à qui je l'ai racheté à la fin de l'année 2023). Il est passé par un atelier romain (connu grâce à l'étiquette), c'est certainement ici qu'il a été démilitarisé. Le 88ème marteau a également été changé, tout comme quelques cordes graves (celles en cuivre). Concernant le reste des opérations réalisées sur le piano à ce moment m'est inconnu. Je ne sais malheureusement pas, dans quelle base américaine en Italie il a joué.

Théo Taillasson de retour d’Italie avec le Victory Vertical. Maintenant au travail….

© Crédit photo : Kharinne Charov           

Concernant les différentes étapes de la restauration :

La restauration a commencé par une phase d'archivage avec un état des lieux du piano au moment où je l'ai récupéré. Après avoir photographié toutes les pièces et décrit toutes les singularités remarquées, j'ai pu commencer la restauration. Cette dernière sera régie par le fait de changer le moins de pièces possibles.

Après avoir pris toutes les mesures nécessaires, j'ai changé les cordes basses. Dans le respect historique de l'instrument, j'ai choisi de remettre des cordes filées en fer, tel qu'à l'origine. C'est le seul changement effectué sur la structure harmonique.

Pour la mécanique, j'ai changé les marteaux. Cette étape implique de démonter les marteaux du montant de mécanique, seulement en effectuant ce geste technique les lanières, trop fragiles, se sont désagrégées alors j'ai également dû les changer. Enfin, pour restituer toute sa mobilité à la mécanique, j'ai changé les axes des marteaux, des chevalets et des bâtons d'échappement.

 © Crédit photo : Raymond Riehl. Royan

Concernant le clavier, j'ai choisi de conserver le revêtement de clavier d'origine, en effet, il présente des singularités. Premièrement sa matière, issue d'un plastique que l'on ne produit plus aujourd'hui (celluloïd imitant l'ivoire). Secondement ce revêtement englobe toute la partie avant de la touche et est pointé sur la touche pour assurer une robustesse à toute épreuve. Comme pour la mécanique, les seuls changements, nécessaires au bon fonctionnement du piano, sont au niveau du clavier : les casimirs de mortaises.

Pour la restauration du meuble, je l'ai entièrement poncé afin de retirer le vernis qui a servi à le démilitariser puis je l'ai repeint dans le but qu'il retrouve sa couleur d'origine. Avec l'aide d'une amie artiste nous avons également repeint la marque car elle était trop abîmée. J'ai choisi de conserver les éclats et arrachements présents sur le meuble, ils sont les symboles de l'histoire de ce piano. J'ai choisi des fournisseurs reconnus afin d'avoir les meilleures pièces possibles (Heller pour les cordes et Abel pour les marteaux).

© Crédit photo : T. T. et voilà le travail.

À propos du temps passé et des coûts, il est difficile de fournir des chiffres précis, cela se compte en centaines d'heures de travail sans compter tous les travaux de recherche et d'archives, le coût se chiffre en milliers d'euros. En définitive les changements se résument aux cordes basses, aux marteaux, aux lanières et à la peinture du meuble. Le reste des changements sont minimes qui servent à rendre le piano de nouveau jouable.

Par le concert du 12 avril 2025 qui fut un succès, les jeunes élèves du conservatoire de Royan ont prouvé qu’il assurait de nouveau. Royan vient de faire une exposition sur cette histoire et une bande dessinée a été créée (interlude) en plus des quelques articles dans les journaux saluant la renaissance de ce piano Victory.(cf association : mel : unpianotombeduciel@gmail.com)








lundi 27 février 2017

Le Cirque et la Musique. Circus Music.

Par José Daniel Touroude

Aprés 146 ans, le cirque Barnum ferme ses portes !

















En hommage au cirque mythique Barnum, qui en ce début d’année 2017 démonte définitivement ses chapiteaux après 146 ans de représentations (rentabilité oblige), nous nous penchons sur la musique de cirque et sur ses musiciens. En France, les cirques restent populaires et malgré les coûts importants arrivent à survivre en évoluant vers des spectacles de plus en plus mondialisés et empruntant à toutes les formes de spectacles parfois assez différents du cirque traditionnel. (Ainsi Phénix, Pinder, Bouglione, Eloize, Cirque du soleil, Gruss etc…. (et les émissions TV reprenant les attractions de cirque) conservent un public fidèle. Le cirque évolue et en conséquence la musique autrefois secondaire devient essentielle, voire une composante du spectacle demandant ainsi des profils de musiciens différents. Notre article sera composé de 2 parties : les fonctions de la musique de cirque et des musiciens qui jouent cette musique.
Reconnaissez vous José, René et Bernie.


















I - Un peu d’histoire sur l’évolution du cirque :
(Romulus selon la légende a attiré les Sabines dans des jeux de cirque pour les capturer et les donner comme «épouses» à ses compagnons fondateurs de Rome ! (clin d’œil pour René Pierre et sa femme Sabine !). Dès la Rome antique les jeux du cirque sont fondamentaux (« du pain et des jeux »), avec les parades, les montreurs d’animaux, les acrobates, les clowns et les musiciens qui déambulent dans les rues.  Mais le cirque, comme nous le connaissons, ne nait qu’au XVIIIème siècle (1770) en Angleterre avec Astley.  Le cirque est alors un spectacle basé sur les chevaux et des prouesses équestres de voltiges, de dressage et acrobaties (Bartabas , Zingaro vont continuer et sublimer cette tradition équestre). Mais Astley crée aussi la succession de numéros différents pour ne pas lasser le spectateur et faire reposer les chevaux et cavaliers, le cheval restant central.  Au XIXème siècle, les autres pays imitent et prolongent cet engouement qui plaît à tous les âges et à toutes les couches sociales : Franconi en France sous le 1er empire, les anglais Pinder s’installent en France, toute l’Europe suit notamment l’Allemagne, la Russie, mais aussi les USA (Barnum).



Une des particularités du cirque est d’être itinérant, se déplaçant auprès du public avec des chapiteaux (1830) et une piste circulaire (de Circus en latin = cercle). Barnum crée son cirque itinérant qui deviendra le plus grand du monde à travers les USA. Néanmoins on construit les premiers cirques fixes pour continuer les spectacles par mauvais temps (Cirque d’hiver à Paris). Mais il n’y a pas de spectacle de cirque sans les amuseurs : clowns-acrobates sur chevaux puis des pantomimes (le mime Marceau continuera cette tradition) et surtout des bouffons habillés de façon ridicules, gaffeurs, nouveaux arlequins… Ces clowns deviennent incontournables dans la deuxième moitié du XIXème siècle, quand il y aura le couple antinomique clown blanc sérieux/Auguste farfelu. Certains clowns restent dans la mémoire collective comme les célèbres Grock, Popov, Chocolat, Zavatta etc… (avant que l’on détourne le clown comme personnage terrifiant dans certains films). Il y a un siècle les frères Fratellini introduisent les clowns musiciens qui deviendront récurrents. Les clowns par le rire défoulent, provoquent d’autres émotions mais aussi détournent l’attention sur la mise en place des numéros suivants.















Au XXème siècle apparaît un autre personnage clé : le dompteur avec la ménagerie d’animaux exotiques féroces et dressés, parfois inconnus. Tous les animaux font des numéros, des canaris aux éléphants en passant par des chiens et des fauves. Certains cirques en font leurs spécialités comme le cirque Krone en Allemagne au début du XXème siècle, les cirques Amar, Pinder, Bouglione en France. Actuellement certains protecteurs des animaux réduisent les spectacles de dressage voire militent pour sa suppression dénonçant la maltraitance supposée. (cirque Plume).              

Du cirque traditionnel au cirque moderne :
Le cirque traditionnel se base sur la dramatisation (trapèze volant « le saut de la mort », ou le « sans filet » désormais interdit,  dompteur de fauves en rappelant quelques accidents terrifiants, numéros dangereux avec des effets  simplistes mais efficaces (notamment le faux ratage pour montrer la difficulté…..). La musique doit alors marquer les temps forts du numéro : le départ, la tension, une réception réussie mais aussi masquer un raté en reprenant la musique au moment de la séquence ratée, clôturer la fin du numéro. L’ adaptation aux chorégraphies des hommes comme des animaux, est essentielle afin que les notes respectent le visuel, être en mesure malgré les imprévus demandent lors de répétitions une mise en place soignée. La musique est la respiration du spectacle, variant selon les numéros. La musique a son rôle dans cette dramatisation car elle accentue l’état d’esprit de tension, de crainte, d’attente puis du succès et du soulagement final ! mais la recette efficace mais trop connue commande de trouver autre chose pour séduire le public rapidement blasé. Le spectacle de cirque traditionnel est une succession de numéros différents (l’ordre des numéros étant fonction auparavant des contraintes techniques comme l’installation de matériel et l’alternance de numéros émotionnels contrastés), avec des transitions musicales et de Monsieur Loyal assurant la présentation des artistes et la cohérence de la représentation.      



















Le cirque moderne se renouvelle en dépassant les traditions (le  carcan ?) du cirque traditionnel pour attirer et réjouir le public consommateur toujours plus friand et attiré par des innovations.  (Fumigène, écrans, jeux de lumières, utilisation des nouvelles technologies pour mystifier….). Le cirque évolue sans cesse, des écoles de cirque recherchent la créativité et revisitent de plus en plus les numéros traditionnels : danses, athlètes sportifs, costumes, musiques en recherchant des performances ou des choses jamais faites. Dorénavant, on recherche un enchaînement logique, une histoire racontée, avec des personnages comme au théâtre ou dans une comédie musicale, ou un film. Un collectif d’artistes créée une cohésion, une troupe et non des artistes individuels qui font seulement leur numéro. Les couleurs voyantes sont à toujours à l’honneur (rouge notamment), les costumes, maquillages , paillettes restent brillantes…. Les odeurs (ménagerie) reculent, l’odeur du crottin de cheval ou des fauves est remplacé par l’odeur du pop corn ! L’évolution du cirque traditionnel entraîne la réduction des animaux, des scènes différentes plus frontales donc théâtrales que circulaires du cirque, des numéros de sportifs et athlètes de haut niveau, des chorégraphes et des chanteurs de music hall…  L’esthétique est fondamentalement différente. En conséquence les types de musiques, les profils des musiciens, les instruments de musique vont se modifier, suivant ainsi les évolutions du cirque.

Écoutez la marche des gladiateurs en lisant cet article.
II - La musique est intimement liée à la vie des cirques et possède plusieurs fonctions :
1.  La musique de cirque doit créer une ambiance :
La musique de cirque doit préparer les attractions  Elle est utilisée dans les défilés, les parades pour attirer le public puis en ouverture du spectacle qui précède les représentations. Son objectif est de créer une ambiance particulière de fête avec une musique entraînante et joyeuse avec un répertoire spécifique au cirque suscitant et imprimant dans le cerveau des images et des souvenirs liés aux cirques : (exemples la fameuse marche des gladiateurs, génériques des émissions de cirque à la TV…). La musique est prise alors comme un déclencheur pavlovien pour préparer le spectateur à la fête et au cirque.   
La musique de cirque doit accompagner les attractions : Elle introduit les numéros et accompagne les artistes rythmant les numéros, amplifiant les émotions voulues par les artistes. La musique a toujours été indissociable aux jeux et aux numéros des artistes même dans la Rome antique ou   depuis le moyen âge où les saltimbanques ambulants se déplacent de foires en fêtes à travers les pays. Actuellement plusieurs compagnies comme Soukha reprennent cette tradition du cirque forain des animations de rues avec musiciens et artistes de cirque sans chapiteaux. 
La musique de cirque doit réussir à combler les intermèdes entre les attractions  Auparavant il n’y avait pas de liaisons entre les attractions  et entre deux numéros, il faut installer du matériel, changer de décor et de costumes et ces temps intermédiaires sont occupés par la musique, les clowns et monsieur Loyal qui en expliquant et en présentant donne le fil rouge et du sens, tout en jouant le patron. Actuellement  le cirque suit les modes du public, en employant des chanteurs et chanteuses, proches de la comédie musicale ou du music hall,  qui servent de liens entre les attractions d’artistes de cirque (mais Pinder faisait déjà cela avec Luis Mariano). On peut noter une évolution : La musique qui était secondaire voire pour combler les trous  entre les attractions du cirque devient de plus en plus une composante essentielle du scénario du spectacle à la fois de cirque et musical.  (par exemple : Alegria du cirque du soleil)
La musique de cirque doit accompagner l’après spectacle : parade finale de présentation des artistes. Mais une fois  la représentation terminée, la musique accompagne encore le spectateur pendant son départ, servant à prolonger l’ambiance, à mémoriser dans le cerveau la musique et le spectacle afin que ce bon souvenir donne une envie de revenir…. Ainsi désormais le cirque vend les CD de la musique des spectacles pour prolonger le plaisir (comme une comédie musicale, un spectacle de variétés ou la musique de film).
2.       La musique de cirque provoque et amplifie des émotions :
La musique de cirque doit susciter et enchaîner différentes émotions, produire des impressions en utilisant différents effets afin d’amplifier les émotions changeantes selon les numéros. Mais toutes les émotions humaines ne sont pas activées. Certaines émotions comme dégoût, tristesse, mépris, colère sont par contre abandonnées.  D’autres comme la joie et le rire, la tension et la surprise, l’attente anxiogène de risques, craintes voire peurs ponctuelles pour arriver au soulagement, des instants de rêves et de poésie, de relâchement et de plénitude…forment la trame des émotions variées qui se succèdent rapidement dans un spectacle de cirque. La musique renforce l’émotion de ce que veut exprimer l’artiste de cirque. Pour faire succéder les émotions, la représentation agit sur des registres différents pour capter un maximum d’émotions diverses afin de susciter les applaudissements pour chaque numéro… le spectacle créant ainsi un cocktail qui interpelle chacun et laisse forcément un impact (au moins sur quelques émotions). Actuellement chaque cirque, chaque spectacle essaie d’agrandir la palette des émotions en rajoutant l’ absurde, l’ironie, le poétique, la provocation, la féerie, le fantastique, l’onirique, le fantomatique, le merveilleux, la contestation voire la morale, la révolte sociale même, le militantisme pour une cause voire un épisode historique, l’humour, l’amour, le désespoir, des références intellectuelles… on est loin de la peur du fauve ou des cabrioles de l’acrobate qui va ou non réussir son numéro avec roulement de tambour et coups de cymbales ! et pourtant ils demeurent présents. Évidemment dans toutes ces émotions le rire est incontournable.

La musique est aussi  indispensable pour déclencher le rire.  Évidemment la musique peut être vite burlesque et accompagner les rires mais là ce n’est plus l’orchestre qui joue mais souvent l’artiste seul (accompagné ou non par l’orchestre) et c’est l’apanage des clowns faisant de la musique avec toutes sortes d’ instruments parfois bizarres ou détournés . Certains sont restés célèbres :  Zavatta, la  poly-instrumentiste Annie Fratellini ( avec son concerto pour un clown)… La musique accompagnait et renforçait les moments burlesques dans les films depuis le muet avec des artistes proches du cirque (Buster Keaton, Laurel et Hardy, les Marx brothers, Charlie Chaplin…)  
3. La musique de cirque interagit avec les autres musiques :
La musique spécifique : il y a des musiques spécifiques au cirque traditionnel et la discographie spécialisée est riche mais il existe aussi une interaction importante entre la musique de cirque et les autres musiques.
La musique empruntée : la musique de cirque vit avec son temps et les goûts du public. La musique de cirque se cale sur les musiques populaires à la mode en faisant des emprunts d’airs connus selon les époques.  La musique de cirque emprunte à la musique classique, chansons de variétés  à la mode, opérettes,  comédies musicales, carnaval, airs à la mode, jazz, latino, disco, tzigane, la musique de film, Rock, Pop, music hall, musique du monde, musiques bizarres , musiques exotiques… mondialisation et innovations obligent. La palette sonore devient beaucoup plus grande à exploiter. L’orchestre de cirque puise dans toutes ces musiques, les arrangent pour accompagner l’émotion suscitée par un numéro de cirque. Les musiciens d’orchestre de cirque participent à la formation musicale du peuple en jouant de la musique variées (d’où le nom de variétés). Toutes ces musiques qui étaient bien identifiées se mélangent désormais, s’interpénètrent comme d’ailleurs les éclairages et jeux de lumières, les costumes, les filles dénudées dignes du music hall… Logiquement les musiciens passent donc d’un spectacle à un autre. L’interaction va dans les deux sens : le music hall reprendra souvent cette fonction de la musique de cirque notamment burlesque (ex : le petit violon de Coluche avec ses gants de boxe, Raymond Devos ou le patinage sur glace sur la piste chez Bouglione, Holiday on ice faisant a contrario des numéros de cirque sur glace notamment acrobaties et numéros burlesques. Certaines musiques de cirque sont originales, de plus en plus créées pour un spectacle spécifique. 

Le cirque et sa musique comme source d’inspiration  :
Le cirque est aussi une source inspirante pour de grands compositeurs : exemples : « le bœuf sur le toit » de Darius Milhaud/ Jean Cocteau, le « circus polka » de Stravinsky, « les forains » de Sauguet, « les clowns ou 8 ½ » de Nino Rota/Fellini… voire pour des chanteurs comme  « l’hélicon » de Boby Lapointe, « le cirque » d’Yves Duteil, ou « le saltimbanque » de Maxime Le Forestier ou « Papa Clown » de Pierre Lozère (un incontournable du répertoire de ma fille Magali !) Le cirque a inspiré aussi nombre artistes peintres comme : Seurat, Toulouse-Lautrec, Picasso dans sa  période rose, Chagall, Buffet, Calder etc…
Georges Seurat.
Le cirque a inspiré nombre d’artistes cinéastes : Ainsi « le cirque » et « les feux de la rampe » de Chaplin, « un jour au cirque » des Marx Brothers, « sous le plus grand chapiteau du monde » de Cecil B de Mille, « 24 h de la vie d’un clown » de Melville, « la nuit des forains » de Bergman, « Lola Montès » d’Ophüls,  « le plus grand cirque du monde » d’Hataway, « la Strada » et « les clowns » de Fellini ou le film récent de 2016 « Chocolat » de Zem ….
III - Le métier d’un musicien d’orchestre de cirque.

Généraliste ou spécialiste ?
Comme dans tout métier il y a d’une part les généralistes qui évoluent dans la transdisciplinarité et leurs compétences résultent d’être bon et de pouvoir passer dans plusieurs domaines et d’autre part les spécialistes qui ont un champ étroit de compétence mais qui ont réussi à posséder une expertise certaine dans leur domaine. Dans la musique professionnelle c’est pareil, certains musiciens passent d’une musique à une autre, sont poly-instrumentistes (music hall, cirque, big band, cabaret, studio… ) et d’autres sont virtuoses dans un instrument voire spécialisé dans un type de musique (musicien classique, jazzmen…). Les qualités instrumentales et psychologiques sont très différentes et même le métier est très différent.
Être poly-instrumentiste :
Bien sûr à la base, comme tout musicien, il doit posséder une formation solide d’instrumentiste. (déchiffrer, maîtriser la technique des instruments, phraser, jouer ensemble ….). Par exemple pour un « soufflant », il faut maîtriser un instrument principal (ex : la famille de clarinettes) puis dominer plusieurs instruments secondaires proches (la famille des saxes) et accessoirement se débrouiller avec d’autres instruments à vent). Les percussionnistes si importants dans un orchestre de cirque ont une palette d’instruments aussi importants à maîtriser . Et puis il y a les instruments ponctuels : Scie musicale, mirliton, grelot, beaucoup d’instruments originaux venant du monde créant toutes sortes de sons nouveaux . Actuellement ce « plus » est très recherché dans le recrutement de musiciens afin de surprendre, d’émerveiller le spectateur et l’auditeur  et d’accompagner un numéro exotique. Les attractions de cirque sont à la fois classiques (et la musique est alors bien référencée) mais doit aussi comporter des nouveautés avec des numéros jamais vus ou époustouflants (et en conséquence la musique doit aussi se renouveler)

Réactivité, adaptation , flexibilité : les  qualités fondamentales.
La concentration est essentielle mais moins sur la partition ou sur des passages difficiles que sur le chef d’orchestre qui lui même est réactif par rapport au numéro, imprimant à l’orchestre des modifications en temps réel. La composition de la musique jouée au cirque et qui accompagne les numéros doit pouvoir se modifier rapidement (en s’écourtant brutalement lors d’un imprévu, un ratage sans que cela soit trop visible, en se rallongeant au contraire si le numéro ne suit pas le timing prévu, d’où des changements de rythmes). Chaque phrase se travaille en fragmenté avec des changements possibles, des improvisations, des arrêts –reprises, des cadences impromptues, des mélodies rallongées… ce qui permet que tout l’orchestre réagisse de suite ensemble dans un stop and go permanent… toute une technique. !  La réactivité est alors la qualité essentielle pour aider les  artistes dans le déroulement de leurs numéros. Cela  demande des thèmes simples, répétés, des leitmotiv ou des cellules ou fragments de quelques mesures, des riffs pour donner des repères aux auditeurs mais avec des possibilités de changements rapides (modulations, changements de rythmes,) en temps réel par le chef d’orchestre . Souvent en conséquence la mélodie est orchestrée à minima , basique pour renforcer le thème, parfois pour mettre en valeur un instrument avec contrepoint simple, en canon ou couplet-refrain. Tous ces procédés sont à maîtriser car les musiques et les numéros s’enchainent rapidement, les temps morts et le silence étant bannis. L’adaptation rapide à tous les changements est la qualité d’un musicien d’orchestre de cirque. Ce qui est recherché n’est pas la maîtrise virtuose d’un instrument afin de jouer des concertos difficiles sans fautes mais de jouer selon la demande quelques notes ou une partition avec d’autres . Les qualités de musicien flexible doté d’un sens artistique et d’un esprit d’équipe, est avant tout un professionnel centré sur la justesse et la mise en place instantanée. 
Mais parfois on demande aussi au musicien de pouvoir faire des sons bizarres, des effets sonores ou de la musique exotique, de chanter, de jouer avec une bande enregistrée plus ou moins en play back, enchaîner différents instruments… Les musiciens doivent posséder de nombreux talents, avoir une solide formation musicale classique et/ou de jazz variétés, revoir une orchestration mais surtout suivre le chef qui réagit instantanément à ce qui se passe sur scène et aux imprévus, soutenir l’émotion du numéro, jouer souvent plusieurs instruments avec un bon niveau technique et d’interprétation, improviser aussi, travailler en équipe mais être aussi soliste, vivre en tournées ….Le musicien d’orchestre de cirque est modeste car il met en valeur les artistes qui sont sur la piste sous les projecteurs !
Tout ceci entraîne la professionnalisation des musiciens  de cirque qui sont souvent de bons musiciens poly-instrumentistes et/ ou pouvant jouer toutes sortes de musiques. Un profil proche des orchestres de danse, de big band et de music hall. Créatif, pouvant élaborer de suite une transition, combler un trou sans que cela se remarque. Une vie souvent proche d’un musicien de music hall, des salles de danses, des boites de jazz et de studio essentiel pour le jeu en orchestre en accompagnement d’un chanteur ou d’une attraction, , musicien de pupitre mais aussi quand il le faut devenir soliste et improvisateur 
Cherchez José........Et oui il conduit le camion.

















Jouer toutes sortes de musique :
Musiques variées des spectacles de cirque mais de plus en plus certains spectacles modernes de cirque ont des musiques spécifiques (cirques étrangers comme le cirque chinois, russe, tzigane (tradition des forains gitans spécialistes du cirque) ou de véritables compositions originales. Ainsi de plus en plus maintenant le spectacle raconte une histoire, avec un scénario. donc une musique plus structurée et complexe, donc une modification du profils d’instrumentiste et une amélioration technique. Certains musiciens ont désormais les mêmes formations de conservatoires que leurs homologues classiques ou de jazz. Ainsi l’excellent orchestre du cirque d’hiver chez Bouglione 15 musiciens rompus aux spectacles et aux arrangements de dernière minute, viennent du music hall (ex : anciens de chez  Johnny Halliday , Eddy Mitchell, big band jazzy…)
 

1990. Bernard Duplaix sur la scène du Théâtre de Chaillot
pour la comédie Musicale "Zazou" de Jérôme Savary.
Parmi les instruments les saxophones et les cuivres sont devenus incontournables.La diffusion et la notoriété des instruments à vent sont intimement liés à la musique de cirque.
Certains instruments à vent (pas les hautbois ou les bassons) sous les chapiteaux avec une acoustique proche du plein air devaient être assez bruyants.(ceci est moins vrai désormais avec les micros et enceintes géantes) mais la musique amplifiée est source de nombreux procès vu les nuisances sonores avec les voisins d’où des problèmes d’installation dans les villes.
Que disent les musiciens de cirque :
« Il n’y a pas d’écoles de musicien de cirque, on apprend ce métier sur  le terrain  avec un répertoire très varié car les dominantes des spectacles changent chaque année : une année c’est de la musique tzigane, puis le spectacle suivant on évoque l’Amérique latine et la musique latino, les USA le jazz et le rock , les musiques russes ou chinoises, les percussions africaines ou la belle époque à Paris ! etc…. « un autre musicien indique « il faut un répertoire d’une centaine de morceaux, pas très difficiles techniquement mais très éclectiques. la meilleure formation n’est pas celle du conservatoire de Paris mais après une base solide avoir été musiciens d’orchestres de variétés  (bal, jazz, big band, music hall… rompu aux tournées et à la scène nous aimons l’imprévu et la réactivité, l’improvisation et le travail minutieux de la mise en place. » « Il faut changer de spectacles donc de musiques et souvent même de styles de musique voire d’instruments ! c’est ce coté polyvalent qui est excitant ». De nombreux cirques remplacent les orchestres par une bande –son , un DJ, voire un orchestre a minima. Malgré les coûts, certains grands cirques gardent un orchestre (cirque du soleil, Bouglione…), la tradition étant que les grandes familles de cirque ont souvent appris la musique (les Gruss, Zavatta, Fratellini….). Mais le cirque est avant tout plébiscité par les enfants et  le cirque est présent comme support pédagogique  et  permet la continuité de ce divertissement à chaque génération. Tous les enfants du monde adorent le cirque aussi, les pédagogues vont utiliser les différents aspects du cirque pour développer nombre d’apprentissages notamment la musique : la connaissance des instruments avec Piccolo, saxo et le cirque Jolibois d’André POPP mais aussi évoquer l’histoire (le show sur l’Ouest américain de Buffalo Bill, l’histoire chinoise par le cirque de Pékin….). Le cirque montre les qualités physiques, la souplesse et la motricité, l’apprentissage des numéros (équilibre, jonglerie, magie, connaissance des animaux etc…. ) et la créativité, dans les déguisements et le défoulement par le rire des clowns….Apprendre en s’amusant merveilleuse pédagogie pour toutes les écoles du monde et rendant ainsi le cirque  intemporel.