jeudi 1 novembre 2018

La famille DIDIER : La Saga d'une famille de luthiers Messins (Metz en Moselle)

Notre ami Jacques DIDIER  nous a quitté le 30 août 2018 
à Woippy (Banlieue de Metz) à 79 ans.


Vous allez découvrir à travers cet article qui était Jacques DIDIER, troisième d'une génération de luthiers : Son Grand père Marius DIDIER (1873-1958) exerça à Mattaincourt à coté de Mirecourt, son père Paul DIDIER (1908-2002) s'installa à Metz, Jacques prit la suite avant de passer le flambeau à son fils Bertrand DIDIER.  

Notre rencontre fortuite  en 2004 mérite   d'être racontée. Ma belle famille possède depuis 1800 une maison familiale dans un petit village lorrain de 50 habitants : Bellange en Moselle situé à 10 kms d'une ville plus importante, Morhange, ville de garnison qui en 1914 était un point essentiel de la défense allemande, et que l'armée française, dès la déclaration de guerre avait attaqué le 18 août 1914, la fleur au fusil, pantalons rouges et sabres au clair .....en avant "sus aux Boches, on les aura". Naturellement le résultat de cette brillante stratégie ne se fit pas attendre : 20000 morts en une journée d'attaque. Notre maison de Bellange servit d’hôpital de campagne, tenu par un médecin militaire qui rédigea ses mémoires résumant cet épisode. Ce document dactylographié retrouvé par hasard dans la maison me donna l'occasion de découvrir le sujet et de comprendre pourquoi il y avait quelques cimetières militaires dans la région. Bien sûr cette épisode peu glorieux  fut zappé au niveau historique et rangé au niveau des anecdotes et remplacé par une "victoire" qui eut lieu quelque temps plus tard lors de la contre-attaque allemande, bataille dite du "Grand Couronné". Un seul bouquin racontait cette bataille dite :" de Morhange" écrit par un certain Jacques DIDIER. 
Le but du moment était de lui remettre les mémoires "du Docteur Pratbernon" que j'avais remises en forme, document inédit à l'époque pour qu'il en fasse bon usage. Pour ma part, mon intérêt était plus tourné vers les "Facteurs, luthiers, marchands de musique de l'est de la France" sur lesquels je travaillais ardemment. Bien sûr le nom de Didier, luthier à Metz  figurait  dans mes recherches, mais je n'avais pas fait le rapprochement. Vous imaginez la suite, lors de notre première rencontre téléphonique, il connaissait mon père qui toujours préoccupé de trouver le violoncelle ou le violon "idéal" pour mes deux sœurs musiciennes professionnelles passait souvent le voir. Depuis nous nous sommes rencontrés fréquemment et son aide à été très précieuse sur les nombreux sujets qui nous intéressaient.

Jacques nous avait raconté sa saga familiale et nous avait fourni de nombreux documents pour l'illustrer dans quelques articles rédigés dans nos blogs. Les voici remis en forme. 

Marius DIDIER (1873-1958) : le fondateur est né à Mattaincourt le 20 avril 1873. Il entre en apprentissage chez Jérôme Thibouville Lamy à Mirecourt à 13 ans. En 1901 il épouse Marie Marthe Bourguignon ; ils auront deux enfants : Madeleine et Paul.
Document Jacques DIDIER.
Après avoir participé à la grande guerre de 1914 à 1918, il rejoint l'entreprise Thibouville où il participe à la réorganisation d'après-guerre et exerce sa profession de maître luthier, au côté de Camille Poirson et Marcel Voiry. Alfred Acoulon, directeur général lui confie le poste de responsable de l'atelier de lutherie de Mirecourt et fait de lui un de ses proches collaborateurs.
Document Jacques DIDIER.
En 1925, à l'âge de 52 ans, il décide de s'installer dans son atelier de Mattaincourt pour exercer la lutherie à son compte en compagnie de son fils Paul.
Document Jacques DIDIER.
Il accueille dans son atelier des stagiaires qui deviendront des luthiers prestigieux (Jean Bauer, Marcel Simon etc...). Son fils Paul décide de s'installer à Metz. L'atelier de Marius DIDIER continue son activité, malgré la crise des années 30 et la guerre 39-45. A la libération, âgé de 72 ans, il continue d'assurer une production qu'il réserve à son fils. Il décède en novembre 1958.
Violon de Marius DIDIER de 1932.
Paul DIDIER (1908-2002) luthier, de Mirecourt à Metz.

Document Jacques DIDIER.

Paul DIDIER est né le 15 janvier 1908 à Mattaincourt (Vosges). Il effectue son apprentissage à partir de 1921 chez Thibouville, auprès de son père qui était à cette époque responsable de la fabrication. En 1925 il fait un stage chez Ouchard, et ensuite travaille dans l'atelier de son père à Mattaincourt jusqu'en 1928 date à partir de laquelle il effectue son service militaire jusqu'en 1929. Il retrouve ensuite l'atelier de son père. Il se marie en 1933 et décide en 1936 et en accord avec son père de reprendre l'atelier et le magasin : "Lutherie d' Art" du 6 rue du Faisan à Metz, créé par Auguste Mouchot, qui venait de décéder en se noyant accidentellement dans la Moselle ; la famille était désemparée, la veuve avait un fils d'un an et ne pouvait s'occuper de ce commerce. A la déclaration de guerre Paul Didier est mobilisé et son épouse qui vient de donner naissance à un fils ne peut tenir seul le magasin qui est alors fermé. Paul est fait prisonnier le 17 juin 1940 à Pontarlier. Il ne rentrera à Metz qu'en août 1945.

Document Jacques DIDIER.
En 1941, Metz est occupé par les allemands qui font venir un luthier autrichien, Franz  NOSEK  et auquel le commissaire de la ville propose d'occuper le magasin de la rue du Faisan. Après 3 années à Metz, celui-ci disparaît en 1944, il est remplacé par Zophel RICHARD né à Markneukirchen.
Magasin de la rue du Faisan. (Doc. Jacques DIDIER)
En août 1945 à son retour de captivité, Paul Didier retrouve son magasin et l'appartement dans un triste état, tout a disparu, seul une partie de l'outillage lui sera rendu. Il se remet au travail, notamment en travaillant pour l'orchestre de Radio Luxembourg et en cogérant l'atelier de son oncle Maurice BOURGUIGNON (1885-1978) à Bruxelles.
Mais la lutherie ne suffit plus à faire vivre une famille, c'est pourquoi il étend son activité aux disques et oriente la formation de son fils Jacques vers les cuivres et instruments à vent. Celui-ci le rejoindra en 1962. Paul DIDIER est décédé à 94 ans en 2002.
Document Jacques DIDIER.
Violon de Paul DIDIER de 1838.
VIOLON MARIUS OU PAUL DIDIER ?

"Lorsque j’assistais mon père Paul Didier dans son activité de luthier à Metz, j’ai pu observer bon nombre d’instruments fabriqués par ses soins, ainsi que ceux de mon grand père Marius. Je dois dire que pour les identifier, il fallait être habitué tellement il y avait de similitudes dans le travail entre le père et le fils. Le fait de travailler dans l’atelier au même établi pendant les années de 1925 à 1936 justifie les concordances de la structure de leurs instruments. Ils utilisaient les mêmes moules et mêmes modèles. La couleur de vernis était propre à chacun. Lorsque le fils, jeune adolescent de 17 ans, commence à fabriquer ses propres violons, son père, ayant acquis une grande habileté dans ses gestes pendant plus de vingt ans chez Thibouville-Lamy, pouvait lui prodiguer les conseils nécessaires. Le modèle extra copie du violon Guarnerius, vernis à l’huile, fait par Marius avait les faveurs des professeurs et des musiciens. Pour le violoncelle extra, le professeur du Conservatoire national de Paris, Louis Feuillard, recommandait le modèle Stradivarius pour la qualité de sa lutherie et sa sonorité".

Jacques DIDIER

Jacques DIDIER  (1939-2018) et Bertrand DIDIER luthier à Metz. 

Jacques DIDIER avec son fils Bertrand.


Jacques DIDIER est né à Metz en 1939. Il apprend la clarinette au conservatoire de Metz et après plusieurs années de formation dans différents ateliers parisiens, notamment 2 ans chez Selmer, il rejoint en 1962 le magasin familial en créant un atelier de réparations d'instruments à vent. En juillet 1983, la Maison DIDIER quitte la rue du Faisan, pour s'installer 25-27 rue du Palais à Metz, adresse actuelle.

Bertrand DIDIER, dirige la société messine. Après avoir acquis son diplôme de luthier dans l'atelier de Jean Jacques Pagès à Mirecourt, il part se perfectionner dans l'atelier du maître Etienne Vatelot.




Pour en savoir encore plus sur la famille DIDIER : le site de référence sur les luthiers : Le site de Roland Terrier

Jacques a légué aux Archives un fond documentaire : Archives de la Lutherie à Mirecourt












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